Jaume Renyer

per l'esquerra de la llibertat

25 de setembre de 2021
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Què en resta de la Gran Síria ?

Gairebé deu anys d’ençà el començament de la guerra multidimensional de Síria, el règim d’Al-Assad continua al capdavant d’un estat fallit malgrat el seu caràcter genocida. No queda pràcticament res del projecte de la Gran Síria, que havia d’abastar l’actual Líban, Jordània, Iraq, Palestina i més enllà, només el Partit Sirià Nacional Social (PSNS), fundat l’any 1932 amb un clar emmillarament en l’Alemanya nazi, manté una presència activa al Líban amb tres diputats a l’actual parlament, provinent de la minoria cristiana.

Alexandre Khouri, va publicat el proppassat 25 de maig d’enguany aqueix article a L’Orient-Le Jour de Beirut: Que reste-t-il du PSNS ?

Les images semblent tout droit venues d’une autre époque. Casquette noire, tee-shirt kaki, marche militaire, les partisans du Parti syrien national social (PSNS) ont défilé dimanche après-midi dans les rues de Hamra pour commémorer l’anniversaire du retrait israélien du Liban-Sud. Une parade au cours de laquelle des menaces de mort à l’encontre du chef des Forces libanaises, Samir Geagea, ont été scandées et qui a remis pour un temps sur le devant de la scène ce parti qui était plus ou moins tombé dans l’oubli. S’il est encore enraciné dans les différentes régions du Liban et peut s’appuyer sur quelques fiefs qui lui sont traditionnellement fidèles (au Metn, à Beyrouth ou à Amioun), le parti, fondé par Antoun Saadé en 1932, est relégué depuis longtemps au deuxième, voire au troisième plan. Il ne compte que trois députés, Assaad Hardane (Marjeyoun-Hasbaya), Salim Saadé (Koura) et Albert Mansour (Baalbeck-Hermel) qui y est affilié sans en être membre. Surtout, le PSNS est affaibli depuis des années par des guerres intestines qui ont éclaté au grand jour le 3 février dernier. Des miliciens fidèles à Assaad Hardane, ancien président du parti, ont pris de force une permanence du PSNS à Batroun. Un événement qui contraste avec l’opacité qui entoure encore la vie intérieure du PSNS dont tous les membres interrogés par L’OLJ ont requis l’anonymat.

Tensions permanentes

Les divisions internes font partie intégrante de l’histoire de la formation pansyrienne, qui a été scindée en deux durant la guerre civile entre une branche réformatrice proche des factions palestiniennes et une autre plus proche de Damas, avant d’être réunifiée en 1978. Depuis la mort de son leader Antoun Saadé, exécuté le 8 juillet 1949, le PSNS a connu des tensions permanentes sur la meilleure façon de pérenniser son héritage, dans un contexte ayant depuis largement évolué.

Né à Dhour Choueir en 1904, le grec-orthodoxe Antoun Saadé a théorisé l’idée d’une « Grande Syrie » regroupant la Syrie, le Liban, la Jordanie, la Palestine, l’Irak, le Koweït, le Sinaï, la Cilicie et même Chypre. À l’origine opposé au nationalisme arabe – le PSNS se rangera dans le camp du président Chamoun lors de la crise de 1958 –, il s’en est toutefois rapproché à partir de 1969. Laïc et anticolonial, le parti a connu un franc succès pendant plusieurs décennies auprès d’une jeunesse essentiellement chrétienne qui ne se reconnaissait pas dans la vision libaniste des Kataëb, le rival historique du PSNS. Le culte de la personnalité dont bénéficiait le chef, le drapeau du parti (une tornade rouge sur fond blanc et noir qui rappelle le svastika nazi), le salut, le caractère ultrastructuré sont autant d’éléments faisant écho au fascisme et qui ont amené ses opposants à l’y assimiler. Si Antoun Saadé, germanophone et germanophile, a sans doute été influencé par les idéologies de son époque, il a toujours nié cette appartenance, même au plus fort de la domination allemande. Sa vision nationale est basée sur l’appartenance à un espace, et non à une race, et ses partisans affirment que l’emblème du parti a été choisi par le leader bien avant qu’il ait entendu parler du nazisme.

« Retrouver sa raison d’être »

L’histoire du PSNS tout au long du XXe siècle est celle de combats armés, de tentatives de coups d’État (en 1961) et d’assassinats politiques. Riad el-Solh est assassiné le 16 juillet 1951 pour venger la mort d’Antoun Saadé. Bachir Gemayel est également assassiné par un membre du parti en 1982. Après la guerre civile libanaise, considérant la lutte contre Israël comme un pilier de son idéologie, il s’allie au Hezbollah au sein de la coalition du 8 Mars, bien qu’ils se soient combattus pendant de nombreuses années. En 2005, après des décennies d’oppressions politiques par le parti Baas en Syrie, Bachar el-Assad laissera les « qaoumiyine » reprendre leurs activités à Damas et dans le reste du pays. La guerre en Syrie qui éclate en 2011 va permettre à la formation de prendre une nouvelle dimension. La branche armée du parti, « les Aigles du tourbillon », recrute des milliers de combattants qui s’investissent dans plusieurs batailles, notamment à Homs ou à Alep. « Le conflit syrien a permis au parti de reprendre des forces et de retrouver sa raison d’être », estime Christopher Salomon qui a consacré un ouvrage à la question (In Search of Greater Syria: The History and Politics of the Syrian Social Nationalist Party). Samir Akil, analyste politique syrien, explique que le PSNS dispose d’une forte popularité en Syrie dans les zones contrôlées par le régime. « Le plus gros des rangs du parti en Syrie est composé des minorités chrétienne, chiite, mais aussi alaouite, ce qui représente une menace pour le clan Assad », observe ce spécialiste basé en Australie.

Les rapports de la formation avec le régime syrien sont toutefois l’une des sources de tension actuelles. Assaad Hardane, qui a voulu briguer un troisième mandat en juillet 2020 – alors que c’est interdit par la constitution du parti –, est proche de Damas et des partis du 8 Mars. Son élection a été décrétée comme nulle. Nombre de partisans lui reprochent de ne pas être fidèle à la ligne historique et d’être entré dans le jeu de la politique politicienne. Après ce scrutin avorté, un mouvement réformateur, dit du 8 Juillet, a émergé. « C’est toute une nouvelle génération de camarades qui rêvent de changement. Le parti a besoin d’une révision de sa stratégie afin de s’adapter à de nouveaux défis, la corruption, l’écologie, l’agriculture et tant d’autres », avance un membre sous couvert d’anonymat. Avec l’élection de Rabih Banate à la tête du PSNS au second round des élections en septembre 2020, la division du parti est entérinée. Certains comités populaires ont accepté le nouveau leadership au lendemain des élections, d’autres le refusent et sont alignés avec Assaad Hardane. S’il est difficile de connaître avec exactitude le pourcentage de partisans et de permanences affiliés au parlementaire, une source au sein du PSNS assure que moins de 20 % lui sont toujours fidèles. Aujourd’hui, les bureaux du PSNS à Raouché sont occupés par la nouvelle administration, tandis que Hardane occupe les bureaux de Hamra avec son équipe.

Avec la désignation du Premier ministre Saad Hariri pour former un gouvernement en octobre 2020, le fossé se creuse davantage. Lors des consultations parlementaires, les parlementaires du PSNS désignent le leader du courant du Futur. Assaad Hardane aurait contredit les recommandations du parti en votant pour l’ancien Premier ministre. « Personne au PSNS ne voulait Hariri, nous savons pertinemment qu’il ne sera pas en mesure de résoudre les problèmes auxquels le Liban fait face », assure un membre du parti.

Post Scriptum, 19 de maig del 2022.

Daniel Pipes ha reproduit al seu bloc un apunt del desembre del 1986, “La Palestine aux Syriens ?“, on recorda la pretensió del règim d’Al-Assad d’incloure els palestins entre els seus dominis: “En 1976, au cours d’une réunion qu’il eut avec les dirigeants de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), le président syrien Hafez al-Assad parla de la Palestine comme d’une région syrienne, plus précisément comme de la Syrie méridionale. Il dit alors aux Palestiniens : « Vous ne représentez pas la Palestine autant que nous. N’oubliez pas une chose : il n’y a pas de peuple palestinien, il n’y a pas d’entité palestinienne, il n’y a que la Syrie ! Vous faites partie intégrante du peuple syrien et la Palestine fait partie intégrante de la Syrie. C’est donc nous, les autorités syriennes, qui sommes les véritables représentants du peuple palestinien. »

Bien qu’inhabituelle dans sa candeur, cette sortie illustre une longue tradition de la politique syrienne, une tradition qui, ces dernières années [en 1986, NdT], a gagné plus que perdu en importance. Le gouvernement Assad ne se présente pas seulement comme un État arabe ayant un intérêt à protéger les droits des Palestiniens mais comme le possesseur légitime du territoire contrôlé par Israël. Puisque, selon ce point de vue, l’actuelle république de Syrie n’est qu’une partie amputée des territoires syriens, le gouvernement de Damas a le devoir de récupérer et d’unir sous son contrôle toutes les autres régions syriennes, y compris la Palestine.”

Post Scriptum, 21 de març del 2024.

Ahir, a Le Figaro, Charles Jaigu: «Ce que nous n’avons pas compris en Syrie».

C’est l’histoire d’un jeune étudiant en géographie qui fait sa thèse à Besançon sur l’évolution des pratiques agricoles du littoral Syrien dans les années 1990. Il se marie avec une Syrienne, de la communauté alaouite. Il continue ses études, prépare sa thèse, apprend l’arabe, et il s’immerge dans la société locale du port de Lataquié. Il découvre peu à peu un pays en péril de guerre civile entre communautés ethnico-religieuses à la natalité débridée. « La population totale a doublé tous les dix ans depuis 1946 (de 3 millions à 26 millions en 2011, NDLR), et les gouvernements syriens d’Hafez el-Assad ou de son fils Bachar n’ont jamais voulu limiter la natalité », nous dit-il lors de notre conversation à Paris – il enseigne désormais à Lyon 2.

Deux cents habitants au kilomètre carré, c’est trop. La gestion des réserves d’eau est catastrophique, sur fond de sécheresses à répétition entre 2005 et 2010. « Bien avant la guerre civile, la Syrie est au bord du précipice », constate-t-il à l’époque. Il n’est pas inutile de faire le lien ici, comme le suggère Balanche, avec le Rwanda, lui aussi dangereusement surpeuplé avant le génocide. Dans un cas comme dans l’autre, la lutte pour le pouvoir d’un groupe face à l’autre entraînera ici un génocide, là la guerre et surtout l’exil forcé.

Malheureusement à Paris personne n’écoute ce Cassandre. Les vents des printemps arabes rejoignent la Syrie qu’on croyait sous contrôle. Et très vite, la violence de la répression par les troupes d’Assad indigne les Occidentaux. Le récit des exilés impressionne. On se laisse convaincre qu’une Syrie démocratique est possible. La croyance néoconservatrice renaît de ses cendres. Pourtant, les guerriers de Daech sont en train de se substituer dès 2012 aux partisans de la démocratie.

On préfère en attribuer la cause à l’habileté d’Assad, qui a libéré, c’est vrai, de nombreux djihadistes pour semer la zizanie dans l’armée syrienne de libération. « Les médias et les experts se laissent abuser par les apparences d’un mouvement prodémocratie », nous dit Balanche, qui exempte Le Figaro de cette erreur de jugement. Un diplomate du Quai d’Orsay lui affirme péremptoirement : « Bachar relâche les islamistes qui étaient dans ses prisons, et il s’en sert pour semer la zizanie dans l’insurrection démocratique, si on vire Bachar, on sera débarrassé des islamistes. » Sur le papier, peut-être. Mais aux yeux d’un géographe de terrain comme Balanche, il s’agit là d’une erreur de débutant. La classe moyenne laïque est un mirage, les mariages mixtes ne concernent qu’une élite urbaine minuscule, et l’intégrisme galopant se répand dans les rangs de la communauté sunnite, si on laisse de côté la bourgeoisie qui travaille avec le régime. Des élections libres ? C’est porter Daech au pouvoir et prolonger le chaos.

On peut plaider qu’il était difficile de discerner la bonne ligne dans ce bruit et cette fureur, surtout quand le Qatar et l’Arabie saoudite déversent leurs dollars sur la « résistance » anti-Assad. Pourtant, depuis le début, Balanche met en garde contre la tentation de forcer la chute du maître de Damas. Qui s’y risquera ne réussira que s’il ose une opération aussi coûteuse que celle des Américains en Irak dix ans plus tôt. Or personne ne veut revivre ce cauchemar. Conclusion : « Les Occidentaux ont encouragé la révolte sans lui donner les moyens de réussir. » Il fallait donc laisser Assad rétablir l’ordre, et surtout ne pas lui donner l’occasion trop belle pour lui d’évacuer toute sa population indésirable vers les pays voisins ou l’Europe. Cette prévision énoncée dès 2012 par Balanche lui a valu d’être accusé de soutenir le régime syrien, ce qui bien sûr n’est pas le cas. Mais l’auteur regarde la géographie et la politique comme elle est et non comme on voudrait qu’elle soit.

Il constate que les Occidentaux et leurs alliés (Qatar, Turquie, Arabie saoudite) ont sous-estimé la détermination des Iraniens à soutenir leur allié dans la région. Mais, surtout, qu’ils ont négligé la détermination de Moscou. Pourtant, Vladimir Poutine avait été clair. Après la chute de Kadhafi, il ne laisserait pas faire un nouveau « changement de régime » comme en Serbie, en Irak ou en Libye. Personne n’avait prévu que les avions russes prendraient possession du ciel syrien. Nouvelle erreur. Un nouvel axe eurasiatique s’affirme crânement au Proche-Orient. Téhéran-Moscou au premier plan, Pékin sur le siège arrière. C’est un échec cuisant.

Et pourtant, en France, on y a cru. Laurent Fabius, notamment, s’est transformé en militant anti-Bachar. Le ministre des Affaires étrangères de François Hollande se montre à plusieurs reprises bien sûr de lui : « Le régime syrien n’en a plus que pour quelques jours », dit-il en 2013. Il répondra que Barack Obama n’a pas fait ce qu’il avait promis, à savoir bombarder les entrepôts d’armement chimique. Fabius aurait pu, tout simplement, écouter les mises en garde. Gilles Kepel, qui rédige la préface du livre, rappelle combien la prise de conscience a été tardive. Il a fallu les attentats de janvier et novembre 2015 pour dessiller l’Élysée et le Quai d’Orsay. « Nous avons à mettre au passif de l’impéritie des dirigeants et des experts les conseillant, qui se sont imaginés, faute de connaissance du terrain, que la Syrie constituait “notre guerre d’Espagne”, rêvasserie noyée dans le sang des Syriens et des Français », accuse Kepel dans la préface élogieuse qui ouvre ce livre. En effet, les djihadistes français revenaient de Raqqa, siège de Daech, où ils s’étaient formés, pour tuer en France. Ils faisaient partie des quelque 1300 apprentis soldats – et non seulement 300, comme on le minora à l’époque – partis combattre pour Daech ou al-Nosra – la branche syrienne de Daech que la France a trop tardivement identifiée comme telle et à laquelle elle a même donné des armes.

Il nous faut abréger notre propos. Ce livre fera date. Il est facile de dire après coup ce qu’il aurait fallu faire. Mais quand on l’a dit avant, et qu’on l’explique après, il faut saluer la clarté et la rigueur de l’analyse. L’auteur avait dit que le régime « sortirait renforcé » de cette guerre, et qu’il provoquerait le départ de 5 millions de personnes au moins -finalement ils furent 8 millions. « Nous nous sommes trompés, et maintenant, on fait comment ? », lui a dit l’un de ses correspondants de la DGSE en 2015, quand il est devenu impossible de nier l’évidence. « Il était bien tard. Cette guerre civile a été l’occasion d’obtenir le rééquilibrage de la population au détriment des sunnites. C’était une priorité du régime et de l’Iran. » L’Europe en a payé le prix en accueillant une grande partie d’entre eux. Le chemin de Damas a décidément le goût des illusions perdues. Lawrence d’Arabie a connu ça en 1919. Son aventure se termine à Damas, lamentablement. Un siècle plus tard, rien n’a changé.

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