Jaume Renyer

per l'esquerra de la llibertat

26 d'octubre de 2023
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Anotacions a Kamel Daoud: “Lettre à un Israélien inconnu”

L’escriptor algerià Kamel Daoud és una figura intel·lectual rellevant de l’espai cultural francòfon, un lliurepensador que defensa la univeralitat dels valors democràtics i denuncia l’islamisme. És també una de les poques veus que s’han alçat des del si del món musulmà contra el jihadisme pro-palestí i ha tingut el valor de publicar aqueix article al setmanari francès Le Point de fa tres dies que avui reprodueix Tribune Juive:

Cher Monsieur,

Je ne regarde plus depuis une semaine, ou de loin, les nouvelles de la guerre venant de votre pays. J’évite cette actualité qui vous tue et tue par vous aussi. Pour quelles raisons ? Les images sont intolérables, inhumaines. Et, égoïste ou trop humain, je me replie sur les miens, je songe à leur salut et je me refuse à ce déchirement de voir des morts sans rien pouvoir y faire. Quand j’étais enfant, dans mon village algérien, ces cadavres d’enfants palestiniens exhibés par des Palestiniens adultes en armes comme des butins inversés, ces corps mêlés de fer et de sang, ces hurlements, nous atteignaient tous.

L’Algérie sortait d’une guerre et désirait à la fois ne jamais en sortir et s’y cacher pour se dérober au présent. La guerre demeurait la seule histoire digne de vie et de mort après tant d’années de colonisations. La guerre en Palestine fut décrétée nôtre : à l’école, à la télévision, par les chefs malins du moment. Cela me mettait souvent mal à l’aise et j’évitais là aussi de regarder ces images. Pour quelles raisons ? Celle de l’impuissance, de la frustration, de la colère sans issue. Ne pouvant être un héros, comme on l’exigeait de moi, je fermais les yeux pour ne pas avoir à savoir ni porter en moi ou emporter ces cadavres dans mes nuits.

Une guerre sans fin

Ces scènes atroces défilaient et peu à peu cultivaient ma future inhumanité. Et parce que je fus éduqué à ne pas connaître le Juif, l’Israélien, parce que vous étiez l’adversaire de Dieu, de la Palestine, de la justice, du prophète et de presque tout, je vous en voulais et je rêvais quelque part de votre disparition. Celle-ci me redonnerait la valeur de ma vie comme on me l’enseignait. Que voulez-vous cher Monsieur ! Les juifs avaient été chassés de l’Algérie depuis longtemps et le creux de l’absent demeure le lit des fantasmes. Vous étiez responsables de tout, d’avoir trahi le prophète de l’islam, la révolution algérienne, la guerre, notre pays, l’humanité… etc. Le français colonisateur étant parti, il nous fallait un ennemi qui mêlerait la rancune présumée d’un Dieu et celle nourrie d’un faux frère. Alors on chantait la mort du juif. La Palestine incarnait un pays volé dont vous étiez le voleur et l’histoire du monde en était ainsi simplifiée. Pour mieux servir la barbarie intérieure.

Avec le temps, l’homme s’assagit. Jeune homme, je compris peu à peu que le Juif était le nom donné dans notre pays au traître, au dissident, à l’homme libre, à l’homme que l’on rejette, à l’opposant, à tout ce que l’on n’aimait pas dans le monde et en nous-mêmes. La Palestine ? C’était un peu le pays où l’on habite, en songe, quand on n’accepte pas le monde, quand on n’approuve pas de vivre et de construire le sien. J’appréhendai, petit à petit, que ce qui animait notre “solidarité” avec la Palestine était notre impuissance à reconnaître notre impuissance et nos réalités. Rien de plus facile pour fuir le réel que de se battre, en mode imaginaire, pour la Palestine. Je rêvais encore de voir la Palestine libre, mais je concluais peu à peu que cette cause offrait une excuse, une fuite en arrière, un prétexte au nom d’un texte sacré.

En fait, le Palestinien ne nous intéresse que mort, blessé, saignant, ou enterré. Vivant, il importe peu. Son pays rêvé et espéré entretenait le sursis dans nos pays et sa guerre ne réveillait pas en nous l’envie de le libérer, mais celle de vous tuer. La “cause” demeurait un effet secondaire de nos replis. Vous nous dispensez de penser, bâtir, travailler et nous interroger sur nos actes et nos responsabilités. Le Juif est la déresponsabilisation de l’Arabe. Cette “cause” fait renaître l’islamiste en chacun de nous, même chez le plus instruit, le plus clairvoyant sur le reste. Elle abîme la lucidité, précipite l’hystérie et travestit, sur le dos du Palestinien, nos réalités. Elle empêche de venir au monde et encourage à en partir. Voilà où nous en sommes à cause de cette guerre sans fin.

Toute guerre est injuste, même justifiée

Cher Monsieur, il fallut du temps pour que je puisse rencontrer les vôtres, tâcher de comprendre votre histoire. Je conclus, et peut-être que je me trompe, que chez nous on n’appréhende pas votre rage à vivre après des siècles de tentatives d’extermination. On ne saisit rien de vos souffrances anciennes ou le poids bouleversant de la terre finalement retrouvée. On ne comprend pas que dans votre guerre, vous voulez vous défendre contre la mort absolue, la disparition définitive des vôtres, morts ou à naître. De l’autre côté, de chez nous, on ne retient que spoliation de terres, reddition, peuple maudit alors que vous êtes un peuple enfin réveillé. On ne voyait en vous qu’une colonisation, et ces dernières années, une épopée archaïque du peuple élu qui se refuse à la loi du dieu qui s’est rangé de notre côté. “Dieu les a maudits”, me répéta un croyant. Et je me suis interrogé : comment un Dieu qui a pour nom “le Juste” peut-il maudire ceux-là mêmes qui ne sont pas nés ? Comment pouvait-il juger de ce qui n’est pas encore venu au monde ? Il pouvait peut-être “maudire” une tribu ou deux, à l’époque où il possédait des cordes vocales, mais aujourd’hui ? Pourquoi dire “maudit” à un enfant nouveau-né ? Au nom de quelle justice divine acceptable ? En vérité, c’est nous qui sommes damnés.

À l’heure actuelle, je peine à regarder ces images de civils tués à Gaza et ce n’est pas parce que je désire vous tuer, ou pour vous en vouloir ou vous combattre. Seulement du fait que je peine à trouver une voix et une voie. Je saisis, enfin, après des décennies, votre volonté, Monsieur, de vivre et d’habiter un lieu après trois millénaires de porte à porte dans un monde de ségrégation. Je comprends peu à peu, dans le vacarme et les conditionnements que j’ai subis dans mon enfance, votre droit, votre désir de vie et de fortune. Je ne voudrais jamais plus ajouter ma voix ou mon hésitation à ceux qui imaginent que vous tuer, vous accuser, vous criminaliser depuis des siècles suffit pour se croire du côté d’un dieu ou d’un colonisé.

Mais je ne peux accepter la guerre d’où qu’elle vienne, et vers où qu’elle prétende aller. Je refuse que des islamistes puissent s’octroyer le droit “divin” ou de “résistance” pour vous tuer, tuer vos enfants et je comprends que vous en veniez à vous battre et faire la guerre pour survivre. Mais je ne peux pas imaginer la douleur et le hurlement de ceux qui gisent piégés entre votre colère, votre envie de vengeance, votre besoin de sécurité et ces groupes de terreur qui prétextent d’une guerre d’indépendance pour étendre leur califat.

Je me convaincs qu’à votre place, j’aurais fait la même chose, mais je me dis qu’une guerre n’empêche pas la suivante, mais la nourrit. Je m’explique votre envie de préserver les vies des vôtres, mais je reste persuadé que toute guerre est injuste, même justifiée.

Ce conflit nous coûte nos libertés

Je ne veux pas ajouter ma voix à ceux dans mon pays qui habillent leurs échecs en cultivant leur haine de vous. Ou ajouter mon silence à ceux qui trouvent dans la guerre que vous menez et subissez les raisons de leurs haines et de leurs refus d’accepter la vie, ceux qui dévorent les cadavres des Palestiniens pour alimenter leurs rancœurs sans tête. Et je ne veux pas ajouter mes cris à ceux qui hurlent qu’il faut libérer la Palestine en tuant les Juifs, mais qui ne font que travestir leurs impuissances dans leur pays, leurs échecs au présent, leurs haines de tout et donc de vous. Mais je refuse d’absoudre des bombardements même si la guerre s’explique par les uns ou les autres, ni croire que c’est la seule voie. Votre histoire de souffrances ne peut se permettre l’égarement et celle des autres ne peut s’accommoder de l’effacement.

Comme après chaque guerre, je vois les perdants et les gagnants. Les premiers restent les morts, partout. Mais aussi les gens qui, dans mon pays, essayent de guérir la haine, lutter contre la judéophobie, engager la liberté et son exigence, l’humanité et sa complexité. Les perdants sont les voix de la raison, car aujourd’hui, chez nous est juif tout homme qui rappelle la liberté, l’universalité, l’humanité ou le droit aux différences. Les perdants sont les Palestiniens que l’on oblige à choisir des armes, que l’on aligne en bouclier humain ou que l’on spolie de leurs biens ou vies et, parmi eux, les bâtisseurs de la paix possible. Et les gagnants restent, chez moi, et chez vous aussi, les radicaux, les dieux à la place d’un dieu, les forcenés de la confession, les tueurs de toute diversité, les enragés, les inquisiteurs du Temple, les ingénieurs des califats dans les pays dits “arabes”, les vendeurs d’armes et les avocats de la guerre d’extermination. Ce conflit coûte des vies et nous coûte nos libertés, nos droits de penser comme l’on veut, nos droits à la liberté d’expression dans nos pays. Il nous coûte notre faible rêve de bâtir un jour des démocraties, des pays heureux.

Cette guerre sans fin a abîmé mon monde, m’a dévoilé le pire : les miens apparaissent souvent nécrophages, ils adorent dévorer les morts et de tous les morts les Palestiniens sont les plus désirés dans cet appétit obscur et mortifère. Car on n’accueille pas le Palestinien chez nous, on ne l’éduque pas, on ne partage pas nos fortunes et biens avec lui. On ne l’aime pas vivant, mais mort, comme preuve à charge, comme preuve de votre crime, comme alibi pour nous dispenser d’aimer les autres, de porter deuil et empathie pour les défunts d’autrui, pour le reste de l’humanité, le vivant. Et vous êtes devenu l’ennemi nécessaire, l’excuse majeure, la figure qui nous exempte de nous mesurer à nos véritables reflets, à nos réalités. Plus la Palestine se rétrécit en territoire et plus, dans nos pays, les califats, les émirats, les royaumes moyenâgeux des islamistes s’étendent.

Nous occuper enfin de nos pays

Bien sûr, cette guerre nous coûte bien moins qu’à vous ou votre adversaire ou voisin. Mais elle nous prive de nos pays et les offre à nos ennemis chez nous, aux armes de la rancune et de la haine, au projet des califats et des totalitarismes. Puisse donc votre pays se libérer de la peur de perdre un foyer et une terre si longtemps promise. Puisse aussi la Palestine se libérer des libérateurs imaginaires de la Palestine et de ceux qui lui prennent ce qui lui reste de terres. Et puissions-nous un jour nous croiser pour combler en nous la part manquante de nos histoires et ainsi battre les haineux et les murs. Puisse un jour le monde reconnaître que vous n’êtes coupables que de trop espérer et avec trop de fureur, et que les Palestiniens le sont de désespérer. Et nous, entre vous deux, puissions-nous un moment comprendre que nous avions fait de vous, le Juif, l’Israélien, l’ennemi pour n’avoir plus rien d’autre à faire dans ce monde que de précipiter sa fin.

Vous connaître, et reconnaître chez nous ceux qui refusent la barbarie “sacrée”, est un long et énigmatique chemin vers la parenté, vers soi, pour beaucoup chez nous et chez vous, mais ils s’y refusent. C’est l’occasion d’une mystérieuse enquête sur nos ombres et nos peurs. L’occasion d’un regard difficile sur nos faiblesses et nos catalogues d’excuses pour ne pas vivre. Et peut-être que c’est en vous connaissant que l’on peut aider le Palestinien à vivre et habiter le monde. Et ainsi ce Palestinien libéré nous aidera à guérir du désir de mourir, d’imiter les morts pour se croire dignes. Et à nous occuper enfin de nos pays. Et de découvrir que le reste de l’humanité existe et qu’elle n’illustre pas une impiété, un complot, une menace.

C’est ce que j’espérais vous dire cher Monsieur. Bien à vous,

Post Scriptum, 2 de desembre del 2023.

Kamel Daoud publicà el proppassat  27 de novembre al setmanari Le Point aqueixa reflexió:  “Même toi?” “Ou la judéophobie d’ambiance”.

Dans un monde où presque tous les hommes deviennent du jour au lendemain des rhinocéros, Eugène Ionesco invente en 1959, dans sa célèbre pièce de théâtre, un personnage réfractaire à la pente grégaire des siens. “Bérenger reste seul devant sa glace. Que faire ? Il hésite un instant se demandant s’il ne doit pas lui aussi les suivre. Mais il décide de résister. Il restera un homme, le dernier des hommes”.

Le spectacle forgea à son tour un terme “générique” encore d’actualité (et plus encore aujourd’hui) pour désigner l’effondrement dans le mimétisme et l’unanimité, voire dans la radicalité et le totalitarisme… enfin tout ce qui peut s’appeler la mort, par renoncement de l’humain à sa liberté et à sa différence.

Aujourd’hui, le synonyme contemporain de la rhinocérite, c’est l’antisémitisme d’ambiance. L’auteur de ces lignes, pour sa part, préfère cependant “judéophobie”. Car ce mal des siècles est de retour : il semble réinventé après les attaques meurtrières du Hamas et la terrible vengeance de Netanyahou.

Entre les deux, des enfants, des femmes, des hommes, en Israël et à Gaza, sont massacrés. Et tout autour, loin, dans le délire et l’hystérie, le spectacle de la renaissance d’un malheur ancien, cette judéophobie qui aujourd’hui se réclame du principe de la solidarité avec les victimes.

On s’acharne alors à confondre judéophobie et solidarité dans une distorsion impressionnante de sa propre conscience et à nier cette évidence : le millénaire réflexe judéophobe se réactive. Il se couvre d’un drap d’indignations nobles, favorisées par les oisivetés et les échecs contemporains dans de nombreux pays. Car si crier “non” à la guerre inhumaine contre Gaza et crier “non” au pogrom du Hamas contre les Israéliens est un devoir éthique, humain, celui de dire “non” à cette judéophobie devenue concomitante de la solidarité s’impose aussi, et dans l’urgence.

Aujourd’hui, nombre d’entre nous expérimentent cette solitude du dernier homme face à la rhinocérite des siens, autour de soi. Que d’ami(e)s perdu(e)s par nombre d’entre nous, de liens refroidis, de désillusions et de déceptions vécues ces derniers temps à croiser des gens dont on estimait la formation, la lucidité, l’humanité et la culture ! Des proches qui actuellement vous assènent la théorie du complot juif la plus grossière et des analyses sur la juiverie internationale qui font froid dans le dos. Qui vous infligent une judéophobie d’ambiance qui croit exprimer la fameuse “solidarité” avec les Palestiniens alors qu’elle ne vise qu’à les utiliser.

“Même vous ?”, est-on tenté de crier en examinant le visage de l’ami. Oui. Dissocier par clairvoyance judéophobie et solidarité n’est plus de mise. Aujourd’hui, le massacre de 400 000 Yéménites fait à peine hausser les épaules d’un “Arabe”, libérateur imaginaire de la Palestine, si on n’y ajoute pas un Juif en tueur.

Le rappel de nos silences sur les carnages de Daech ou nos oublis des 200 000 morts algériens de la guerre civile close par l’amnésie ne désarçonnent pas cette rhinocérite butée. L’explication humble que l’on ne peut pas faire cesser la mort et la guerre avec la haine en contrepoids n’intéresse plus.

C’est alors qu’autour de soi se creusent ce vide effarant, cette désillusion profonde, la solitude du dernier homme.

Même toi ?”, pensé-je. Ne peut-on pas rester éveillé et dire “non” à l’islamisme du Hamas (dont beaucoup souffrirent dans les pays dits arabes) et cesser de lui chercher des excuses décoloniales ou religieuses tout en soutenant aussi les Palestiniens qui en sont victimes ? Ne peut-on pas dire “non” aux morts de Gaza, mais sans en faire les seuls cadavres dignes d’indignation, à l’exclusion de toutes les autres tragédies de notre siècle ? Ne peut-on pas garder mesure, rester honnête et ne pas réveiller la haine en soi au nom de la solidarité ?

Non. La réalité est que la judéophobie, masquée par l’émotion sélective, se porte bien.

Mais de quoi cette rhinocérite est-elle le nom finalement ? Pourquoi même les plus lucides tombent-ils dans sa tranchée hideuse en se réclamant du “non” à la guerre ? Qu’éveille-t-elle d’ancien en nous et qui, sous le prétexte du présent, ne fait que rejouer des millénaires de haines ? Mystère.

Pourquoi persiste-t-on à habiller ses échecs, ses oisivetés, ses aigreurs de cette cause sélective qui n’accorde de l’empathie qu’à une partie de l’humanité tout en accusant avec virulence l’Occident de tous les maux ? Pourquoi mille morts “arabes” ne valent-ils rien, si le meurtrier n’est pas le Juif ?

“Même vous ?”, et on se désole de tout et, désarmé, on se retrouve seul. Confondu avec le dernier des hommes.

Oui, la judéophobie est une rhinocérite. La judéophobie est-elle irrationnelle ? Oui, en ce qu’elle a d’ancien et de millénaire, de mystérieux comme hostilité, d’antique comme caricature du nez crochu et de l’usure, et de traditionnel comme masque de la haine au nom de l’amour des siens.

Pourquoi hait-on tant le Juif ? À cause d’Israël ? Il n’y avait pas d’Israël avant. Il y a un siècle, il y a trois siècles, ou même à la création de l’islam ou de la chrétienté. 

Un jour, un proche me fit part de sa théorie fascinante et terrible : Voici, m’explique-t-il, une histoire de jalousie. Le Juif incarne le lien le plus ancien de l’homme avec Dieu, la conversation immémoriale et révoltée face au ciel, et on l’envie. Et les siècles apparaissent comme une “histoire d’ombrage” entre les prétendus enfants uniques et ce Dieu. Une tradition de haine de soi envers cet inconscient profond judaïsé, ce lien entravé ou entravant avec la divinité, un rapport maladif avec le sacré ou avec le “Temps” et son écoulement dans l’Histoire. Le Juif serait notre inconscient et le récit de la part ignorée en soi, de l’altérité laborieuse. Finalement, ce peuple n’aurait jamais été “maudit” que par le plus grand nombre, en ce sens que “Dieu” n’est souvent que le masque des furieuses unanimités.

“Même toi ?” pense-t-on alors qu’une ancienne amitié refroidit, sous le prétexte de la solidarité avec le Palestinien dépossédé de la terre et de la vie. Cette solidarité qui aujourd’hui ne libère, chez énormément de monde, que les haines millénaires et si peu le Palestinien.

Nous n’aimons le Palestinien que tant qu’il saigne, meurt, et qu’il sert à faire oublier nos échecs à vivre, à aimer et à accepter. Et nous ne haïssons le Juif – à peine distingué de l’Israélien – que tant qu’il demeure coupable de tous les crimes, qu’il nous permet de blanchir les nôtres.

Le Palestinien apparaît, tragiquement, comme le contrepoids hystérique à nos indifférences maquillées en scintillantes identités, et le Juif n’est que le prétexte qui dédouane nos détestations. Voilà, souvent, la plus affreuse des réalités.

“Même lui !”, raconté-je à un autre ami. Et j’explique, brisé, comment notre ami commun justifie la haine par la haine, le massacre par la colonisation des terres palestiniennes, le Juif par le mal, et comment il s’autorise, par sa propre histoire et ses échecs personnels, une judéophobie dormante, une judéophobie d’ambiance. Comment il blanchit l’islamisme par le décolonialisme et l’univers par la Palestine où il n’a jamais mis les pieds.

Et mon ami hausse les épaules…

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