Jaume Renyer

per l'esquerra de la llibertat

26 de juny de 2024
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Anotacions a Boris Cyrulnik : « Jamais je n’aurais imaginé revivre ce cauchemar »

Boris Cyrulnik (Bordeus, 1937)  és neuròlegpsiquiatre i psicoanalista i un dels fundadors de l’etologia humana, va conceptualitzar la noció de resiliència psicològica, motivat pel fet que amb set anys va veure com tota la seva família, emigrants jueus d’origen rus, eren deportats a camps de concentració nazi dels que mai no van tornar. La seva formació multidimensional en fa un referent intel·lectual a França i arreu del món occidental. Tot i no empatitzar amb el sionisme i l’estat d’Israel és prou clarivident com per assenyalar l’antisemitisme de La France Insoumise: ” Mélenchon, à mes yeux, c’est l’extrême droite. C’est Doriot, le collaborationniste nazi qui avait fondé le Parti Populaire Français”. Abans d’ahir va ser entrevistat pel diari La Tribune sobre múltiples qüestions d’actualitat:

LA TRIBUNE – Vous interveniez à Prague lors d’un congrès de l’Académie des Sciences consacré à la résilience, lorsque la double sentence est tombée le 9 juin au soir : en France, la victoire du pôle d’extrême droite (40% des suffrages) et une heure plus tard la dissolution. Comment vos hôtes ont-ils « reçu » le coup de tonnerre ?

BORIS CYRULNIK – Ils étaient atterrés. Y compris pour eux-mêmes, car ils redoutent que les répercussions sur le fonctionnement et l’avenir de l’Union européenne entraveront leur propre développement. Atterrés et dans l’incompréhension, eux qui ont connu les deux extrémités – nazie et communiste – du spectre totalitaire et qui en 2021 ont écarté le régime du « Trump tchèque » Andrej Babis. Voilà un peuple érudit, polyglotte, habitué aux mixités transfrontalières avec la Pologne, l’Allemagne, l’Autriche et bien sûr la Slovaquie, et qui regarde une France qui, elle, fait le choix de l’enfermement à l’intérieur de ses frontières et du rejet des étrangers. Oui, incompréhensible…

On vous sent extrêmement affecté, aussi parce que ce contexte réveille les cauchemars de votre petite enfance, vous qui vous êtes miraculeusement échappé d’une rafle à Bordeaux qui eut raison du sort de votre famille…

Je suis « dans » le dernier chapitre de mon existence, et voilà que j’entends les mêmes mots, j’observe les mêmes haines, je déplore les mêmes lâchetés, je constate la même désunion qui enténébraient le premier chapitre de ma vie, à la fin des années trente et pendant la guerre. Jamais je n’aurais imaginé revivre ce cauchemar, être de nouveau hanté par ces abominables discours désormais prêts à irriguer l’exercice du pouvoir. Les historiens aiment assurer que « l’histoire ne se répète jamais ». J’avoue ne plus les suivre.

Une nuance tout de même : le RN incarne une politique xénophobe et discriminatoire, mais il est presque parvenu, au moins médiatiquement, à se débarrasser de ses oripeaux antisémites – la désignation (avant mise à l’écart) de candidats antisémites aux législatives rappelle toutefois quelque tenace réalité. Et ces oripeaux, c’est à l’extrême gauche dorénavant qu’ils s’expriment. Une inversion des attributs provoquée par le conflit israélo-palestinien, exploitée d’un côté (le RN) pour s’afficher « pro-juifs » (Serge Klarsfeld), de l’autre (LFI) pour draguer les suffrages des Français issus de l’immigration. Rangez-vous LFI et le RN dans le même « sac » de l’intolérance raciste ?

Mélenchon, à mes yeux, c’est l’extrême droite. C’est Doriot, le collaborationniste nazi qui avait fondé le Parti Populaire Français. Je n’ai pas de mots assez durs pour illustrer l’émotion, le dégoût que suscitent au fond de moi les déclarations post 7 octobre des députés LFI, son créateur en tête. Et depuis, leurs tergiversations sur l’acte de barbarie perpétré par le Hamas n’ont pas cessé de m’écoeurer. Aux fins de récupérer les voix des habitants des banlieues issus de l’immigration, ils instrumentalisent le conflit et distillent subrepticement une rhétorique antisioniste et en réalité antisémite répugnante. Charles Maurras « aussi » clamait ne pas être antisémite…  Peste brune et peste rouge m’inspirent une même nausée.

Vos engagements personnels dans le brasier proche-oriental qui empoisonne la campagne politique française et fracture un peu plus encore la société, sont anciens. Vous avez toujours milité en faveur d’un Etat palestinien, vous êtes régulièrement intervenu en Cisjordanie comme universitaire ou médecin. Non sans risques. L’incohérence rappelle – toutes proportions gardées bien sûr – celle du 7 octobre : la plupart des victimes de l’atroce pogrom du Hamas, résidentes de kibboutz et fêtards, étaient de sensibilité pro-paix…

A plusieurs reprises dans mon existence, mes engagements en faveur de la paix m’ont valu des menaces de mort en provenance des extrêmes droites israélienne et française. Tout comme Edgar Morin, Robert Badinter ou Jean Daniel, mon adresse a été publiée sur internet, accompagnée pendant plusieurs mois d’exhortations à m’assassiner. Des articles négationnistes accompagnés de petits cercueils en bois m’ont été postés. Et je n’ai pas manqué non plus d’être insulté par des individus issus de l’immigration, cette fois pour ma judéité. Bref, des deux côtés d’une adversité que je n’ai jamais cessé de vouloir rapprocher l’une de l’autre et réconcilier, j’ai été la cible. L’indicible histoire de mon enfance s’est à plusieurs reprises brutalement rappelée à moi. Et dorénavant j’éprouve le même vertige.

C’est la construction européenne qui au lendemain de la guerre a initié la réconciliation des nations, et osons le mot : la réhumanisation de peuples qui s’étaient atrocement entredéchiré. Votre génération qui a suivi la libération doit à l’Union européenne la paix, elle a même puisé dans cette construction des éléments du « processus de résilience » que vous avez modélisé et popularisé. Le 9 juin dernier, 40% des suffrages se sont portés vers un rejet de l’Europe, et l’hypothèse de l’arrivée de Jordan Bardella à Matignon pourrait déchiqueter l’UE. Cette peine vous accable-t-elle tout autant ?

Je me répète : l’adage des historiens discréditant toute répétition de l’histoire au nom de contextes sans relation les uns aux autres, me semble présomptueux. Si je fais référence à la xénophobie, au repli sur soi et à l’intérieur de ses frontières, à la stigmatisation de groupes religieux ou ethniques, à la marginalisation des plus faibles et au rejet des étrangers, évoqué-je 1935 ou 2024 ? Bien malin qui peut répondre. Qu’adviendra-t-il de l’Europe si les 27 pays de l’Union ne s’accordent plus sur le soutien à Volodymyr Zelinsky et laissent l’innommable stratégie guerrière de Poutine annexer l’Ukraine ? Personne ne pourra me dissuader de la similitude des époques. Il faut avoir réellement vécu et pas seulement étudié dans les livres l’une et l’autre pour émettre un avis fondé.

La société et le paysage politique français sont aujourd’hui davantage que morcelés : scindés. Deux blocs se font face, enserrant un « centre » qui s’est délité au fil des ans et n’est plus guère attractif. Là encore le parallèle avec les années trente est significatif.

Cette période ante Seconde Guerre mondiale en effet était fortement clivée. Au PPF de Doriot ripostait un Front populaire dominé par la montée en puissance des communistes. Le « centre » était invisible. Un activisme de gauche violente s’opposait à des mouvements de droite violente. L’extrême violence des deux clans divisait et inquiétait la société, et finalement la radicalité de l’un s’est superposée sur celle de l’autre jusqu’à banaliser la violence elle-même. Cette complicité des extrêmes est la même que celle à laquelle nous sommes aujourd’hui confrontés. J’y ajoute une nouveauté : l’érotisation des comportements extrémistes, qui s’applique à l’expression du sadisme et de la démonstration de force.

Cette complicité des extrêmes, qu’illustre-t-elle de notre organisation sociale ?

Justement, son antonyme : la désorganisation sociale. Or à quoi une société désorganisée aspire-t-elle ? A un sauveur, et peu importe le clan qu’il représente.

Qu’avons-nous collectivement perdu, méprisé, négligé, qui a créé ce climat de haine instrumentalisé par les pôles extrémistes et qui affaiblit si dangereusement notre démocratie ?

En premier lieu la capacité de débattre dans l’écoute, le respect, la nuance. Notre goût du débat démocratique est intoxiqué, le désaccord est synonyme de division alors qu’il est par nature source d’enrichissement mutuel, nous peinons à trouver des espaces de dialogue.

Ceux-ci semblent réduits aux réseaux sociaux, à des biais algorithmiques, et à des chaines de télévision qui hystérisent les relations humaines et donc défigurent le débat politique censé éclairer le débat public. Comment y faire face ?

La qualité du débat politique est à l’image de l’offre politique incarnée par les deux pôles extrémistes : démoralisante. La profusion d’insultes, la quasi obligation de « faire le buzz » pour être repris sur les réseaux sociaux, le diktat des éléments de langage établis par les « services communication », la hâte qui caractérise les formats des émissions, rendent le débat politique, c’est-à-dire la confrontation utile d’idées, impossible. La radicalité est devenue la norme des échanges, elle a dévoyé la démocratie, elle a légitimé et popularisé le visage de l’autoritarisme ; faut-il s’étonner alors que le 8 juillet soit peut-être désigné à Matignon Jordan Bardella ou Jean-Luc Mélenchon ? La place qu’occupe la technologie dans nos sphères professionnelle et personnelle n’est pas étrangère à ce constat. Elle est devenue si importante qu’elle nous coupe de la réalité sensible ; la communication par la technologie s’est imposée à celle de la parole, du regard, de l’écoute, du geste, du silence, de l’attention, de la considération, c’est-à-dire à la communication par l’humanité. Le débat politique reflète cette vérité. Quant aux réseaux sociaux, nous savons que leurs algorithmes enferment les utilisateurs dans des schémas et des groupes endogames, dressant ensuite ces groupes les uns contre les autres – avec souvent la complicité complotiste et conspirationniste – et brisant alors la possibilité même de débat respectueux et profitable. Lorsque j’étais adolescent et sensible au communisme, je me complaisais dans des lectures de journaux qui me confortaient dans mes convictions. Moi-même donc m’enfermais. Mais nous avions accès librement à d’autres journaux, et donc plus tard j’ai pu choisir une presse plurielle grâce à laquelle j’ai découvert l’abomination stalinienne et ai remis en question des certitudes – un séjour en Roumanie à l’âge de 15 ans m’y aida aussi…. Ce choix, ce libre-arbitre, aujourd’hui la force de frappe technologique nous en dépossède. De plus, comme la lecture a tendance à décliner, une partie de la population s’en remet à ces funestes réseaux sociaux pour construire ses croyances et son argumentaire. Bref, c’est un cycle infernal.

Redoutez-vous que, s’il accède au pouvoir, le RN étende sa stratégie de normalisation et de séduction initiée après 2017 et arraisonne, petit à petit, la capacité de discernement, de libre-arbitre, et donc de résistance d’une partie de la population ?

Ce risque de sédimentation idéologique est à mes yeux l’un des plus sournois et plausible. Je vais l’illustrer par un témoignage. Il y a peu, j’écoutais un journaliste français en poste à Moscou. Il se pensait tout à fait imperméable à la propagande poutinienne, surtout armé de sa conscience et de son expérience de journaliste censées le protéger des influences et des ingérences. C’est seulement une fois de retour en France, confronté à un tout autre environnement informationnel, professionnel, familial, amical, qu’il a découvert et pris conscience combien en réalité il s’était laissé contaminer, malgré lui. Preuve que même équipé des plus fortes convictions, on ne résiste pas au martèlement permanent et multicanal du récit collectif, et donc à la subreptice tentation de la résignation ou de l’abdication.

Vous évoquez la figure du « sauveur ». N’est-ce pas d’elle qu’Emmanuel Macron se revendique ? N’est-elle pas l’origine de son autocentrisme décisionnel, de sa cécité face à l’évidence de son impopularité, in fine de son acte au soir du 9 juin ? Ce dernier, massivement qualifié d’incompréhensible, d’irrationnel, et même de suicidaire, résulte-t-il de la redoutable combinaison de l’hubris et de la blessure narcissique ?

Je connais bien Emmanuel Macron… et avant même sa naissance (rires) ; en effet, dans le cadre de mon internat, j’avais sous ma responsabilité deux jeunes externes : ses parents, dont je conserve un excellent souvenir. J’ai travaillé avec lui pendant presque deux ans dans le cadre de la commission Attali puis j’ai piloté à sa demande le rapport des « 1 000 premiers jours » (de l’existence) remis en 2020. D’Emmanuel Macron, je retiens d’abord une volonté et une capacité réelles d’écoute et d’attention, une culture et une élégance délicieuses. Son intérêt pour l’opinion d’autrui est sincère. Mais parfois les actes ne reflètent pas les intentions ou les impressions. Son refus d’entendre certains appels de la communauté scientifique pendant la pandémie Covid-19 et de décider seul contre eux, seul contre les plus compétents, en est une illustration. Ce que révèle son inexplicable décision le 9 juin, c’est sans doute en effet un hubris démesuré qui s’est traduit par un délire. Délire à considérer bien sûr dans son acception non psychotique – on peut être parfaitement équilibré et déclencher un acte délirant. Son attrait vraisemblablement obsessionnel pour l’extraordinaire, que matérialise et consolide sa trajectoire politique et professionnelle, peut isoler. Isoler de la raison, du sang-froid, de la lucidité, des contrepouvoirs, car on cherche alors à exister seulement dans l’extraordinaire. Ce qui peut conduire à la faute. La solitude obstrue la clairvoyance et la raison.

L’un des marqueurs d’Emmanuel Macron et dont sa décision du 9 juin est symptomatique, c’est aussi l’hyper-impatience, l’hyper-précipitation. En cela il est à l’aune d’une époque que les outils technologiques ont transformé en injonction de « faire immédiatement ». Le temps est devenu un adversaire quand il est sous contrôle ou mis à distance, un allié lorsqu’on le comprime sans limite et qu’on le laisse nous submerger. L’ivresse du temps est l’ennemi de la raison.

Ce juste constat s’applique à l’échelle de l’individu bien sûr, mais aussi à celle d’un pays. Exemple ? Les Etats-Unis. Voilà le plus pays le plus riche, et celui où l’on recense les pathologies les plus dévastatrices liées à la consommation et au stress. L’espérance de vie des femmes recule, les taux de suicide et la gangrène des opiacés impressionnent, le fléau de l’obésité (et donc du diabète) est vertigineux. Dans un domaine que j’ai bien étudié, l’anxiété des bébés, le constat est effarant. Impossible de les calmer lorsqu’ils pleurent. Pourquoi ? Parce que mère et père évoluent dans une société où tout est vitesse, consommation, écrans, bruit, vulnérabilité, où rien n’est concentration, silence, apaisement, sécurité.

Où les gains de l’existence, établis et normés par l’hyper-compétition et l’hyper-insatiabilité, sont dictés par le gain de temps

Exactement. Quand les parents sont à ce point stressés par la nécessité de « faire vite », il est naturel que les bébés soient contaminés. Est-ce irrémédiable ? Je ne crois pas. Chacun connait l’esprit de compétition exacerbé au Japon, qui affecte les plus jeunes écoliers. Il se traduit par ce qu’on dénomme la « deuxième école » ; le soir, après la fin des cours officiels, les enfants rejoignent des formations complémentaires. Les plus riches d’entre eux étudient dans de confortables établissements, les autres dans des cafés ou même des caves. Bref, le temps de la scolarité s’étend sur une journée et demi ! Les pouvoirs publics se sont inspirés du rapport « Les 1 000 premiers jours » pour fermer les portes de ces « deuxièmes écoles », à la fois parce qu’elles attentent évidemment à la santé psychique des enfants, et aussi parce qu’elles consolident les inégalités sociales.

Le pays tout entier, mais aussi chaque groupe social – familial, amical, professionnel, associatif – auquel on appartient s’expose à des déchirements, tant l’abîme idéologique est abyssal entre pro et anti-RN, entre pro et anti-Nouveau Front de gauche (celle-ci liée à la présence de LFI). Comment pouvons-nous anticiper et cautériser ce péril ?

Par le passé, l’affaire Dreyfus avait radicalement divisé et fracturé jusque dans les familles. Chaque conflit, chaque guerre tracte son lot de déchirures, parfois sanglantes. Lors de la guerre civile en Espagne, républicains et franquistes s’affrontaient physiquement lors des banquets de famille. Et les exemples sont infinis. Ce que les cas de déchirement ont en commun, c’est la désorganisation. Une famille qui se déchire c’est parce qu’elle manque de structure ; un pays qui se déchire, c’est parce son organisation sociale est affaiblie. Quelle que soit l’échelle qu’on observe, ceux qui échappent aux déchirements ont réussi à cultiver et à préserver un espace de dialogue, d’écoute, de respect même lorsque l’objet de la communication est aussi aigu que celui auquel nous sommes aujourd’hui confrontés. Ils acceptent le désaccord…

… et pour cela distinguent l’opinion – contestée – de celle ou celui – respecté(e) – qui l’exprime. Ces déchirements ne sont pas un péril pour tous. Ils deviennent précieux dans les mains de ceux qui les instrumentalisent. A commencer chez les forces politiques extrémistes, et particulièrement chez les personnalités les incarnant qui cherchent à tresser un lien de fascination et de subordination auprès de leur électorat. Le désordre profite toujours à quelqu’un…

Cette réalité, incontestable et pourtant peu visible, je vais l’illustrer par une apparente digression. L’envahissement des nouvelles technologies favorise la destruction des liens à laquelle elle substitue l’illusion des liens. Celle-ci confère au « bonheur » d’être accessible immédiatement et par tous.  Qui en profite ? Notamment le – prolifique – commerce du bien-être et du développement personnel. Prospère alors une cohorte de coachs, de conseils, d’associations ad hoc, de traités fallacieusement présentés comme scientifiques, sans autre légitimité que celle autorisée par l’absence de règlementations et par l’appât du gain. Ils agissent comme des tranquillisants, dont l’enjeu est d’alléger leurs proies de leurs responsabilités. En résumé : « Si je n’accède pas au bonheur, ce n’est pas de ma faute. Et si je recours à un tranquillisant, je vais y parvenir », pensent-elles. Pour cela, la figure incarnant celle ou celui qui va l’extraire du tunnel et l’amener vers la « lumière » est cardinale. En effet, elle doit détourner sa « victime » de l’essentiel : son libre-arbitre, et donc son exercice de la responsabilité. Au procès de Nuremberg, les prévenus se dédouanaient de toute culpabilité, affirmant avoir simplement obéi : « On m’a donné l’ordre de tuer. J’ai donc tué ». Le tranquillisant prend souvent la forme d’une personnalité, charismatique, une sorte de gourou en qui on voit un « sauveur ». Les dictateurs parvenus au pouvoir par les urnes ont cette particularité en commun. La priorité pour riposter à la dilution des liens est de réapprendre à négocier la présence de l’autre. Chacun est en transaction avec autrui, c’est-à-dire qu’il doit respecter des règles grâce auxquelles autrui existe à ses yeux et il existe aux yeux d’autrui. Ces règles sont induites dans la culture, dans la parole, dans l’écoute, grâce auxquelles nous apprenons à contrôler nos pulsions et à construire cette transaction. La culture est tout sauf élitiste, elle n’est pas seulement un grand opéra mozartien, elle est tout autant un livre simple, une chanson légère.

Elle est ce qui nous émancipe, nous libère, nous autonomise. Et nous lie.

Oui ! Alors cultivons la culture !

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