Jaume Renyer

per l'esquerra de la llibertat

21 d'abril de 2021
0 comentaris

La falsa equiparació entre islamo-gauchisme i judeo-bolxevisme

Arran de la controvèrsia suscita a França al voltant de l’islamo-gauchisme, els qui se’n senten interpelats recorren en defensa pròpia a l’equiparació amb l’animadversió contra el juedo-bolxevisme que es va escampar per part dels addictes a l’ordre establert als anys trenta del segle XX.

La jove assagista Eugénie Bastié va publicar abans d’ahir a Le Figaro aqueix breu, però punyent, article per tal de clarificar les diferències entre un i altre moviment: Islamo-gauchisme et judéo-bolchevisme: le faux parallèle.

Interrogé sur France Inter samedi 17 avril sur l’ «islamo-gauchisme», l’ancien ministre Benoît Hamon a déclaré: «J’observe qu’on a parlé des ‘‘judéo-bolcheviques’’ avant la Seconde Guerre mondiale, les mêmes, le même courant, maintenant ce sont les islamo-gauchistes. On ne se rend pas compte de là où on va aujourd’hui.» En faisant ce parallèle historique, Benoît Hamon mettait en garde sur le retour du même, tropisme intellectuel omniprésent à gauche qui consiste à comparer la situation présente avec les années 1930 et la montée d’un fascisme aux conséquences que l’on sait. Il n’est pas le seul à s’engouffrer dans cette brèche. L’historien Shlomo Sand, qui a lui-même «cessé d’être juif» par empathie pour la cause palestinienne, avait fait cette analogie lui aussi. Rebondissant sur l’usage de plus en plus répandu du terme «islamo-gauchisme» il avait évoqué son père communiste polonais qualifié jadis de «judéo-bolchevique».

Aujourd’hui le terme «islamo-gauchiste» ne désigne pas un intellectuel musulman converti au socialisme mais un compagnon de route parfaitement athée de la religion supposément des faibles. Cette expression, certes devenue galvaudée, désigne la convergence entre des intellectuels de gauche et des mouvements islamistes, par exemple le soutien à la révolution iranienne de la part de Sartre et Foucault, les défilés communs entre extrême gauche occidentale et Hamas au début des années 2000, l’aveuglement d’une partie de la gauche au péril islamiste après les attentats. Et ce pour plusieurs raisons: tiers-mondisme, recherche d’un prolétariat de substitution, ou culpabilité historique.

Née après la révolution de 1917, l’expression «judéo-bolchevisme» visait, elle, à dénoncer un complot juif derrière la prise de pouvoir en Russie. «Il n’y a plus moyen de contester que les 95% des grands chefs soviétistes soient juifs (…) Dans toute l’Europe, il est le voyageur de la révolution.» écrivait par exemple Charles Maurras dans l’Action française en 1920. On insiste aussi sur les origines juives de Karl Marx. On voit derrière l’internationalisme révolutionnaire la trace du «cosmopolitisme» juif. «Lorsqu’elle s’est diffusée, au début des années 1920, dans certains milieux anticommunistes et antisémites, l’expression ‘‘judéo-bolchevisme’’ signifiait que le bolchevisme était un phénomène juif et que les bolcheviques étaient en fait des Juifs (ou des ‘‘enjuivés’’)» rappelait récemment Pierre-André Taguieff dans Libération. Aussi, le «judéo bolchevisme» s’inscrit dans une histoire plurimillénaire de l’antisémitisme indissociable du complotisme qui conduit à supposer le pouvoir exorbitant d’une minorité juive dans les événements historiques (guerre, révolution, épidémie).

Si l’antisémitisme s’appuie sur une rhétorique du complot, la dénonciation de l’islamo-gauchisme s’appuie sur une accusation de compromission bien différente. Cette comparaison fallacieuse entre islamo-gauchisme et judéo-bolchevisme n’est que la réplique d’une analogie tendancieuse entre une prétendue islamophobie de la France d’aujourd’hui et l’antisémitisme tel qu’il a pu se déployer en Europe dans l’entre-deux-guerres. On cherchera en vain les pogroms et les «nuits de cristal» visant les musulmans dans notre pays aujourd’hui. Vouloir calquer sur une haine supposée des musulmans le modèle de la haine des juifs, c’est faire fi de l’histoire spécifique de l’antisémitisme dont le judéo-bolchévisme n’était qu’un des manifestations.

Dans Les Origines du totalitarisme, Hannah Arendt montre bien les deux écueils à éviter lorsqu’on pense l’antisémitisme: l’idée d’un antisémitisme anhistorique, sorte de «malédiction» sur le peuple juif, et l’idée du «bouc émissaire» des Juifs comme victimes contingentes de l’histoire. Elle écrit: «Cette théorie qui présente les Juifs comme d’éternels boucs émissaires implique que le bouc émissaire aurait pu être tout aussi bien n’importe qui d’autre». Dire que les Juifs furent des boucs émissaires, c’est finalement éluder la profondeur et la spécificité de l’antisémitisme en affirmant que n’importe quels «parias» auraient pu subir ce déchaînement de violence.

C’est bien cette théorie que reprennent ceux qui voient dans les musulmans d’aujourd’hui les nouvelles victimes expiatoires de la crise de nos démocraties. C’est nier délibérément la montée de l’islamisme, et que celui-ci produit lui-même aujourd’hui dans certains milieux musulmans une nouvelle forme d’antisémitisme. Une réalité dont Benoît Hamon devrait tenir compte plutôt que de se lancer dans des rapprochements terminologiques hasardeux.

Deixa un comentari

L'adreça electrònica no es publicarà. Els camps necessaris estan marcats amb *

Aquest lloc està protegit per reCAPTCHA i s’apliquen la política de privadesa i les condicions del servei de Google.

Us ha agradat aquest article? Compartiu-lo!