Jaume Renyer

per l'esquerra de la llibertat

20 d'agost de 2016
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Brice Coutourier: “Le Parti des médias et l’intelligentsia méprisent la réalité”

El periodista Brice Coutourier ha estat animador del prestigiós programa radiofònic  “Les matins de France Culture” entre els anys 2011 i 2016, ocupant un lloc privilegiat per tenir una visió panoràmica de la vida intel·lectual francesa (les seves opinions ja han estat reflectides anteriorment en aqueix bloc).

Ara analitza el que anomena el “partit dels mitjans”, una mena de poder fàctic corporatiu de professionals de la comuniació que traslladen a la ciutadania la visió de les èlits universitàries majoritàriament ancorades en un progressisme abstracte i banal que passa de la sobredimensió d’anècdotes irrellevants a la indignació arbitrària segons el pensament políticament coorecte dominant. Obviant, dissortdament, la lliure deliberació d’idees i realitats en favor de dogmes i ficcions, com ja va succeïr a la França dels anys trenta del segle passat.

Ahir va  ésser entrevistat per Le Figaro que resumeix les seves respostes amb un titular significatiu: “Le Parti des médias et l’intelligentsia mésprisent la réalité”que ben bé es podria aplicar també al subsistema mediàtic català (majoritàriament hispanocèntric, sectari contra “la dreta” i les identitat nacionals, inclosa la catalana, claudicant davant els totalitarismes, especialment l’islamisme).

De septembre 2011 à juin 2016, vous avez été chroniqueur et co-animateur dans Les Matins de France Culture. Que retenez-vous de ce quinquennat sur le plan intellectuel et politique?

Brice COUTURIER. – Un quinquennat, oui, l’expression est bien trouvée. C’est d’ailleurs un principe de vie: je change d’activité tous les cinq ans. Ces cinq dernières années, j’ai donc écrit chaque jour un éditorial que j’ai lu le lendemain matin sur notre antenne de France Culture, afin de lancer le débat de la deuxième partie des Matins. Lorsque le directeur de l’époque, Olivier Poivre d’Arvor, m’a proposé ce défi, je lui ai fait remarquer que l’éditorialiste d’un journal, c’est quelqu’un qui reflète la ligne éditoriale de ce titre et qu’en ce qui me concerne, je me regardais comme assez décalé par rapport à celle de France Culture. Mais c’était précisément ma différence qui l’intéressait. Il souhaitait que je provoque l’invité des Matins, en lui balançant des idées susceptibles de le faire réagir. Là où l’exercice trouvait ses limites, c’est que je n’étais pas toujours autorisé à répondre à l’invité – notamment lorsqu’il démolissait mon papier. Sans doute fallait-il que le tenant du «politiquement correct» conserve le dernier mot… J’apparaissais ainsi comme un trublion qu’on sort de sa boîte, afin de provoquer un peu, mais qu’on s’empresse de faire taire lorsqu’il a joué son rôle afin que tout rentre dans l’ordre. Dommage, car j’ai travaillé sérieusement chaque sujet de manière à pouvoir poursuivre la discussion en m’appuyant sur des faits.

Ce qui m’a frappé dans les débats des dernières années, c’est la difficulté avec lesquels ils sont parvenus à émerger. Car les plus importants d’entre eux portent précisément sur les sujets dont le «Parti des médias» – pour reprendre l’expression créée par Marcel Gauchet – tente d’empêcher l’évocation… Il y a comme ça, à chaque époque, des problèmes vitaux qui forment comme un angle mort du débat public. Ce sont précisément ceux qui vont décider de l’avenir. En 1936, après la remilitarisation de Rhénanie par Hitler, dans la plupart des médias français, il était presque impossible d’évoquer la perspective d’une guerre avec l’Allemagne. Tous les gens de bien étaient furieusement pacifistes… On trouverait bien un terrain d’entente avec le chancelier allemand, disaient-ils. Mais dans les cafés et les salons, on ne parlait que de ça.

Aujourd’hui, l’histoire est à nouveau en phase d’accélération brutale et le défi qui nous est lancé par l’islamisme politique, entré en phase de conquête du monde, est redoutable. Mais le Parti des médias, aveuglé par ses bons sentiments, préfère nous abreuver de petites nouvelles insignifiantes, d’une part, de ses grandes indignations, de l’autre.

Vous croyez à un «complot des médias»?

Je n’irais pas jusque-là. Mais comment ne pas voir que le rassemblement de quelques milliers de bobos place de la République, prétendant proposer une réalité radicalement alternative, a été monté en mayonnaise afin de gommer les 4 millions de Français, descendus spontanément dans les rues pour protester contre les attentats islamistes de janvier? Pour ne prendre que cet exemple. De la même façon, chaque fois que le discours lénifiant sur le «vivre-ensemble» est contredit par des faits, ceux-ci font l’objet d’un remontage. Combien d’attentats islamistes ont été requalifiés en «actes commis par un déséquilibré»? Ou alors, on organise à la hâte une diversion.

Mais ce n’est pas l’essentiel. Le pire, c’est qu’il y a trop peu d’intellectuels capables de discerner les grands courants de fond sous le miroitement de surface. En finissant l’année, sur France Culture, par une série d’été consacrée à Raymond Aron, j’ai voulu montrer ce qu’avait été mon ambition au cours de ces cinq années. Il est mon modèle. Aron aussi était éditorialiste. A Combat, au temps de Camus, puis au Figaro, surtout, et enfin à L’Express. Et tandis que les simples journalistes se contentaient de rapporter les faits au jour le jour, lui savait discerner, en historien, les tendances profondes, celles qui allaient modifier les rapports de force, redessiner la carte, décider du mouvement de l’histoire. Aujourd’hui, nos chers confrères passent leur temps à guetter le fil de l’AFP, afin d’être «les premiers sur une info». Ils sont concurrencés par internet qui met tout ce fatras de pseudo-news, de «stories», à la disposition de chacun. Ils misent sur l’antériorité pour légitimer leur profession ; ou encore sur leur connaissance personnelle des acteurs politiques pour rapporter leurs propos à des stratégies individuelles de conquête du pouvoir. Ce faisant, ils rabaissent la politique et contribuent au développement du populisme ambiant.

Alors qu’il leur faudrait jouer sur la compétence, la capacité du spécialiste à interpréter les faits, à discerner la manière dont le monde est en train de se réorganiser. Mon problème tient à ce que j’étais censé être un spécialiste universel: parler économie avec Attali un jour, histoire avec Pierre Nora, le lendemain, politique internationale avec Védrine, le surlendemain et conclure la semaine sur la littérature américaine avec Richard Ford…. Sans oublier de me faire traiter de crétin par Montebourg, de journaliste partisan par Copé, ou d’agent de l’Allemagne par Marine Le Pen! Mais le pire, c’était de supporter ces idéologues de petit calibre, cooptés par leurs camarades de l’Université, qui tiennent lieu d’intelligentsia aux yeux des journalistes bien-pensants. Quel dialogue peut-on avoir avec ces personnages, arrogants quoiqu’incultes, et d’autant plus pérorant qu’ils méprisent les faits, les chiffres, la réalité? Ils prétendent déconstruire ce qu’ils n’ont jamais cessé d’ignorer.

La vie des idées a-t-elle beaucoup évolué depuis cinq ans? Certaines idées neuves sont-elles apparues? Quels sont les grands débats qui vous ont le plus marqué?

Sur tous les plans, on se rapproche de la vérité en marchant en crabe. Ça ne facilite pas le règlement des problèmes. Prenez l’économie. Il y a cinq ans, le débat portait sur les délocalisations: nos problèmes venaient de l’étranger, qui ne respectait pas nos règles, qui prétendait réussir en ne faisant pas comme nous. La Chine, voire l’Allemagne nous faisaient une concurrence déloyale. À partir d’un certain moment, on a commencé à s’inquiéter de la désindustrialisation. C’était approcher du vrai problème, celui du manque de compétitivité de notre appareil productif. Encore quelques mois, et on a commencé à réaliser que nos entreprises supportaient des charges disproportionnées par rapport à celles de leurs concurrentes et qu’il convenait donc de les alléger, après les avoir augmentées. Mais c’est justement l’un des sujets dont le Parti des médias ne veut pas entendre parler, comme du déficit budgétaire et de l’endettement.

Pour ces aveuglés, l’absence de croissance française, le niveau extravagant du chômage n’ont qu’une seule cause: «l’austérité»… Mais si l’austérité, c’est un niveau de dépense publique inouï, qui absorbe 57,5 % de tout ce que produit le pays, le plus fort taux de prélèvement obligatoire d’Europe, et une dette publique de 100 % du PIB, alors je demande comment on va qualifier l’économie allemande… Un État dont le budget est équilibré et qui, étrangement, a un taux de chômage deux fois inférieur au nôtre. Encore une fois, pour prendre un exemple. Mais dans tous les domaines, c’est la même danse du ventre: on approche de la vérité en tournant autour, plutôt que d’affronter franchement nos problèmes.

L’économie n’est pas seule en cause. La vie des idées, dans notre pays, pâtit du fait qu’un faible nombre de gens sont à la fois suffisamment qualifiés et suffisamment honnêtes pour en rendre compte. Les chers confrères, dans l’ensemble, préfèrent rabattre la nouveauté sur les schémas qu’ils connaissent. Cela a pour conséquence de figer le débat, de le ramener à des lignes de clivage devenues autant d’ornières: souverainistes versus euro-enthousiastes, républicains versus démocrates, libéraux contre étatistes, communautaristes contre républicains et, bien sûr, droite/gauche. Mais les nouveaux sujets transcendent ces catégories et les font exploser. Dans le domaine éthique, en particulier. Et on tente d’intimider ceux qui posent de bonnes questions en les traitant de réactionnaires, ou d’ultra-libéraux…

Le tournant de ces 5 ans a été l’attaque de Charlie hebdo et la litanie des massacres qui a suivi. Au lendemain des attentats du 13 novembre, votre Lettre ouverte aux djihadistes qui nous ont déclaré la guerre a bouleversé vos éditeurs… Vous vous identifiez au nomade hyperconnecté de Jacques Attali et puis tout a changé. Pourquoi ?

Oui, cela a constitué pour moi un choc, une rupture personnelle. Ayant vécu une partie de mon adolescence au Liban, repris des études à Oxford à 42 ans, enseigné trois ans en Pologne, beaucoup bourlingué en Europe, du Nord au Sud et d’Est en Ouest, j’avais fait mienne l’idée d’Attali selon laquelle les nations étaient en train de devenir des hôtels où l’on pose provisoirement ses valises, en prenant pour critère le rapport qualité/prix. En s’attaquant aux Juifs, comme l’ont fait Merah et Coulibaly, à un symbole de l’esprit de ma génération, comme Charlie, les infiltrés du djihad, cette cinquième colonne islamiste, m’ont «rendu la France», comme disait Aragon. Poète communiste, il a tourné patriote lors de l’occupation, après avoir longtemps conspué le drapeau et la Marseillaise. Je me suis senti visé personnellement par les fous de Dieu. Comme dit Orwell, dans Le lion et la licorne, cet hymne au patriotisme britannique, «Car nous combattons des hommes à l’intelligence vive et maléfique et le temps presse…». Mon père, maquisard FFI à 18 ans, a fini la guerre dans un bataillon de choc. Lorsque j’ai vu la formidable réaction, spontanée, de la population, opposant 4 millions de poitrines aux tueurs, semblant dire: «nous sommes bien trop nombreux, vous ne pourrez pas nous tuer tous», je me suis senti conforté dans l’idée qu’il fallait défendre le vieux pays menacé.

Mais il faut en être conscient: il va devenir de plus en plus dangereux de vivre dans un pays qui refuse le chantage des islamistes: soumettez-vous ou bien vous mourrez. C’est une raison supplémentaire de rester: tenter de renforcer le camp de la résistance. Et non leur abandonner le terrain. Ne pas collaborer lâchement, comme la dernière fois…

Pour certains observateurs, les «néo-réactionnaires», pour reprendre la formule de Daniel Lindenberg, auraient gagné la bataille des idées. Partagez-vous cette analyse?

J’ai été le premier journaliste à faire parler Lindenberg, lorsqu’il a publié Le rappel à l’ordre en 2002. Le livre n’était pas encore en librairie que je l’avais invité à l’émission que j’animais alors sur la grille d’été de France Culture, Contre-expertise. C’est vous dire si le livre m’avait paru intéressant. Certes, il avait le défaut de mêler, dans une même réprobation, tout ce qui, dans la vie intellectuelle, déplaisait à son auteur – de Pierre Manent à Alain Badiou, de Michel Houellebecq à Jean-Claude Milner. Mais il avait le mérite de pressentir un changement dans l’air du temps. L’époque où une bande de «vigilants» parvenaient à interdire qu’on aborde certaines questions – concernant la compatibilité de l’islam et de la démocratie, par exemple -, l’époque où ils pouvaient chasser en meute un intellectuel du calibre de Pierre-Alain Taguieff, était en train de s’achever. L’eau avait commencé à bouillir. Le couvercle qu’ils avaient longtemps maintenu était en train de leur sauter à la figure.

J’avais invité Lindenberg parce que ma conception à moi d’une émission de débat sur une chaîne du service public, c’est le pluralisme, la diversité idéologique, la curiosité intellectuelle. Et non le militantisme au service d’une cause. Celle qu’on croit juste, ou celle grâce à laquelle on pense servir au mieux ses intérêts de carrière…

Bien sûr, les intellectuels, très divers, que la bande des maîtres-penseurs a qualifié de «néo-réactionnaires» n’ont pas conquis le pouvoir intellectuel. L’hégémonie intellectuelle est toujours détenue par «presse qui pense», même si elle a de moins en moins de lecteurs: Télérama, Les Inrocks, Le Nouvel Obs, Libé, etc. C’est elle qui donne le ton, décerne des brevets et censure ce qu’ils appellent les «dérapages». Ces contestataires professionnels sont étonnés et furieux d’être à leur tour contestés. C’est que l’espèce de bouillie intellectuelle, ce néo-marxisme rudimentaire à base de slogans creux qui leur sert de pensée s’est fracassé sur la réalité sociale. Souvent demeurés intellectuellement dans les années 1960/70 (Derrida, Foucault, etc.), ils s’acharnent à «transgresser», à «renverser des tabous», alors qu’il n’y a plus, en face, que le vide. Ils rejouent éternellement la scène originelle de 68, alors qu’on a radicalement changé d’époque. C’est pourquoi les gens qui pensent juste ont opéré, depuis le début de notre XXI° siècle, ce retour à Camus, à Arendt, à Orwell – qui n’étaient certes pas des penseurs «réactionnaires». «Empêcher que le monde ne se défasse», comme disait Camus. Et ne pas pousser la tolérance à l’absurde, en prétendant tolérer la barbarie. Ne pas justifier l’inacceptable au nom du relativisme des valeurs.

Vous reconnaissez-vous dans les idées de certains d’entre eux? Lesquels?

Oui, sans doute. Grâce au métier que je fais, journaliste culturel, je rencontre tout le monde et je suis payé pour lire. Quel luxe! Alors, dans le paysage intellectuel francophone, je vous dirais apprécier beaucoup Marcel Gauchet, Pascal Bruckner, Nicolas Baverez, Dominique Schnapper, Jean-Marc Daniel, Jean-Pierre Le Goff, Kamel Daoud, Philippe d’Iribarne, Boualem Sansal, Malika Sorel-Sutter, Mathieu Bock-Côté… Je voue aussi une immense admiration à Jacques Julliard, une espèce de modèle pour moi depuis mes débuts de journaliste. Non seulement c’est un historien immensément cultivé, mais c’est un intellectuel sans tarifs réduits ; avec lui, tout le monde a droit au même traitement. Il est sans indulgence particulière envers les siens, sans agressivité particulière envers les autres. Sine ira et studio. Mais lorsque je me retrouve devant mon ordinateur, avec un article à écrire, je pense: comment Christopher Hitchens tournerait-il ça? Orwellien lui aussi, «Hitch» savait comme personne mettre le doigt sur l’hypocrisie, la mauvaise foi, le double standard moral. Et c’était un esprit absolument libre. Un véritable voltairien de la fin du XX° siècle. Il n’a aucun équivalent en français, mais quelques héritiers en Angleterre, comme Nick Cohen.

Lors d’un débat sur «Nuit debout», vous avez quitté le plateau sur ces mots: «Moi je ne veux pas incarner à moi tout seul la diversité idéologique autour de ce plateau, donc je vous laisse entre vous.» Est-il devenu impossible de débattre en France ?.

Écoutez, on venait d’entendre trois invités et un journaliste ayant fait un reportage sur place, à République, s’extasier, dire combien tout cela était nouveau, prometteur, bouleversant… A les entendre, on était à la veille d’une nouvelle prise de la Bastille, d’une réinvention de la démocratie. Ces affligeantes «assemblées générales» allaient accoucher d’une réalité alternative… On voit ce qu’il en est advenu: beaucoup de bruit pour rien. La surexposition médiatique de ces rassemblements contrastait péniblement avec l’affligeante pauvreté des propositions qui en émanaient. Mais le Parti des Médias rêve de l’arrivée au pouvoir d’une «vraie gauche de gauche». On nous a fait le coup avec die Linke, en Allemagne, puis avec Chavez au Venezuela, qui a ruiné le premier détenteur de pétrole de la planète… Ensuite, il y a eu Podemos, Occupy Wall Street, Jeremy Corbyn… Moi, je crois qu’on peut modifier le réel dans certaines proportions lorsque cela est souhaitable. Mais pas lui substituer une autre réalité, sous prétexte qu’elle serait plus conforme à l’idéal de certains utopistes. J’aurais disposé d’une minute pour dire que je n’étais pas au diapason de cet enthousiasme collectif, avant de me faire remettre à ma place en tant que «réactionnaire». Alors oui, j’ai refusé, non pas de débattre, mais de servir de tête de turc. Je suis resté à les écouter s’entre-congratuler. Je ne suis pas «parti en claquant la porte», contrairement à ce qu’ont écrit les médias gauchistes à l’époque. Trop de «débats», dans nos médias, sont ainsi «montés», de manière à en truquer le déroulement, empêcher la libre confrontation des idées. Il y a des experts…

Vous définissez-vous toujours comme un libéral de gauche?

À l’époque où j’avais un engagement politique, je roulais pour Rocard au sein du PS. En 1985, j’avais créé un club de discussion, Rouleau de Printemps, qui se définissait comme un rassemblement de jeunes libéraux de gauche. Je pense être resté fidèle à cet idéal. «Le socialisme, c’est quand la liberté arrive dans la vie des gens les plus pauvres», a écrit Carlo Rosselli, l’un des théoriciens du libéralisme de gauche, assassiné en France par les sbires de Mussolini. Je pense que la véritable lutte des classes n’oppose pas tant les salariés aux entrepreneurs que les insiders du système aux exclus, les détenteurs de rentes à ceux qui sont prêts à emprunter l’escalier de service lorsque l’ascenseur social est en panne. La «défense des avantages acquis» est un mot d’ordre qui profite aux planqués. Tony Blair disait: «ce qui est social, c’est ce qui crée des emplois». Il avait raison. Notre système a fait le choix implicite du chômage de masse. C’est une calamité. Non seulement, le chômage détruit des vies, mais il rend des millions de personnes dépendantes de l’État pour leur survie. Il bloque toute ambition, il étouffe cette «étincelle vivante» que les hommes portent en eux et qui, selon Goethe, «se recouvre de la cendre toujours plus épaisse des nécessités quotidiennes si elle cesse d’être alimentée.»

Vous êtes également un européen assumé. Durant ces cinq dernières années, l’Union européenne a essuyé de multiples crises: la crise grecque, mais aussi celle des migrants et dernièrement le Brexit. Quel regard portez-vous sur l’évolution de la construction européenne?

Je suis revenu à France Culture en janvier 2002 avec une émission hebdomadaire consacrée à l’Europe, Cause commune, que j’ai animée pendant cinq ans. À l’époque, je croyais que l’Europe pouvait devenir une puissance capable, en alliance avec les États-Unis et les autres démocraties, de rivaliser avec les grandes puissances émergentes. Que nous pourrions contribuer à définir un ordre du monde basé sur le droit international, la souveraineté des peuples, la démocratie, les droits de l’homme… Encore aurait-il fallu que les dirigeants européens assument notre héritage. Qu’ils n’aient pas honte d’être européens.

Or, ils ont agi comme s’il fallait se débarrasser de notre culture. Comme si notre formidable héritage les encombrait. Le continent qui a donné au monde Leonard de Vinci, Cervantes, Shakespeare, Rembrandt, Racine, Mozart, Goethe, Hugo, Proust, Pessoa, Chaplin, Milosz… illustre ses billets de banques avec des ponts et des fenêtres. Pour ne froisser personne, paraît-il. Entre l’arrogance et la haine de soi, il devrait exister une position moyenne. Quand je suis rentré de Pologne, je suis allé voir la rédactrice en chef d’un magazine consacré à l’Europe avec des projets d’article sur l’apport de la culture centre-européenne à l’identité européenne. «Moi, ce qui m’intéresse dans l’Europe, c’est l’Autre», m’a-t-elle dit. Allez demander aux Chinois, aux Indiens ou aux Turcs, si c’est «l’Autre» qui les intéresse prioritairement!

Alors, oui, c’est raté. Tel que c’est parti, c’est raté. Cette Union européenne, qui refuse d’être une puissance politique, est prise en tenailles. Elle est coincée entre l’islamisme qui se rapproche de nous par la Turquie et risque de nous entraîner dans le chaos proche-oriental et la contre-révolution culturelle tentée par Poutine, avec son rêve impérial post-soviétique. Cette UE, régie par le droit et le marché, purement procédurale et évitant toute décision politique, cette Europe-là est condamnée. Ses concepteurs ont cru à la possibilité d’un avion en pilotage automatique. Ça pouvait marcher par temps calme, mais aussitôt qu’est apparue une zone de turbulence, en 2008, la machine s’est enrayée. Lorsqu’il a fallu décider quelque chose, c’est la BCE, organisme technique, qui a dû assumer des décisions politiques. Les dirigeants de l’UE ont refusé à l’Europe toute identité, toute substance, toute limite géographique: ils ont créé une coquille vide, un ensemble flou dans lesquels les citoyens ne reconnaissent pas. Comment s’étonner que ceux-ci se réfugient dans leurs États-nations. Au moins, pensent-ils, on en contrôle les dirigeants en les remplaçant lorsqu’ils prennent de mauvaises décisions. Et on peut en défendre les frontières, ce que l’UE refuse de faire, face à une crise migratoire qui va s’aggraver. Je le déplore, parce que nos petites nations en communauté de déclin ne font pas le poids face aux géants émergents. Il faudra tenter autre chose, une fois ce chapiteau-là démonté.

La montée des «populismes» vous inquiète-t-elle?

Dans son Essai sur l’esprit d’orthodoxie, Jean Grenier, le professeur de philo de Camus, écrit: «L’extension de l’instruction ne va pas toujours de pair avec le progrès de la culture. Les masses sont de plus en plus éclairées, mais les lumières sont de plus en plus basses. Les idées courtes et simplistes ont plus de succès que les autres». Face à la complexité du monde, à ses métamorphoses difficiles à saisir, les gens se réfugient dans des explications simples. Cela a nourri les grandes idéologies du XX° siècle. Le fascisme, le marxisme, offraient des réponses simplettes à des questions compliquées. Mais il y a aussi quelque chose de positif dans ce que les élites baptisent «populisme»: les simples gens ont parfois une vision plus juste que des dirigeants vivant hors-sol, dans l’ignorance des vrais problèmes de la population.

Reste qu’il souffle indéniablement sur la planète un vent mauvais. Il nous faut réaliser que, contrairement à ce qui se passait durant les trois dernières décennies du XX° siècle, ce n’est pas la démocratie qui a le vent en poupe. Le système du parti unique chinois, les «démocratures» de Russie ou de Turquie apparaissent, depuis longtemps déjà, à bien des gens du Sud, comme plus à même de bien contrôler les choses. A présent, c’est aussi le cas dans notre Nord. Voyez Donald Trump. Nous avons affaire à une concurrence sérieuse. La victoire des démocraties, en 1945 et 1989, peut très bien s’avérer n’avoir été qu’une heureuse parenthèse. Mais, pour moi, la démocratie est un horizon indépassable et je ressens une solidarité spontanée envers chacune d’entre elles – des États-Unis à Israël inclus.

Vous apparteniez au comité de rédaction de la revue Le Meilleur des mondes depuis sa création. Vous avez été favorable au droit d’ingérence et aux différentes interventions militaires de l’Occident depuis la guerre en Irak de 2003. Quel bilan faites-vous de cette politique étrangère «néo-conservatrice»?

Qui peut nier que les peuples du Moyen Orient aspirent, eux, à la démocratie? Les racistes nous répètent que les Arabes ne sont «pas mûrs», que leur société civile n’est pas assez émancipée, que l’islam constitue un facteur de blocage insurmontable. J’ai vibré à l’unisson des «révolutions arabes», qui rappellent tellement le Printemps des peuples européens de 1848. Je n’ignore pas leur échec, à peu près général, à l’exception de la Tunisie. On ne peut nier que l’islamisme, qui guette les occasions d’avancer ses pions et de contrôler les sociétés, a profité des libertés conquises. Là où il a cru son heure arrivée, comme en Egypte, il a provoqué la réaction des militaires. Mais les peuples n’ont pas dit leur dernier mot. Après 1848, nous avons eu aussi une sévère réaction en Europe. La liberté ne se conquiert pas en un jour.

Mais qu’on ne vienne pas me dire qu’avec les despotes – Saddam Hussein, Kadhafi et Bachar el-Assad, Moubarak, nous vivions dans un monde «plus sûr». C’est l’inverse qui est vrai. Ces systèmes politiques, archi-corrompus et tyranniques, étaient tous au bout du rouleau. Dans le combat entre «réalpolitiques» cyniques et droits-de-l’hommistes, solidaires des peuples en lutte contre leurs tyrans, je persiste à choisir ces derniers. En ce qui concerne l’Irak et la Syrie, l’erreur politique, c’est Obama qui l’a commise. En retirant prématurément ses soldats d’Irak, à une époque où Daech comptait 200 combattants ; et en refusant de soutenir la rébellion démocratique contre al-Assad, ce qui a laissé le champ libre aux djihadistes, encouragés par le régime…

Post Scriptum, 12 de novembre del 2016.

Brice Coutourier ha fet, a Le Figaro d’ahir,  una valoració del resultat de les eleccions presidencials americanes en consonància amb el contingut d’aqueix apunt, titulada: “Donald Trump a mis une claque au Parti des médias”:

La victoire de Donald Trump a surpris l’écrasante majorité des «experts» et des médias ainsi que la classe dirigeante. Comment expliquez-vous une telle cécité?

Quelle claque! Plus de 200 journaux américains avaient soutenu Hillary Clinton. Tous ceux qui comptent, des plus élitistes, comme le New York Times, le Washington Post ou le Wall Street Journal, jusqu’aux plus populaires, tels que USA Today, théoriquement non-partisan, voire même le Daily News. En face, 6 seulement soutenaient le candidat qui allait, finalement, l’emporter. Des titres de très peu d’importance, d’ailleurs. Ce que cela prouve? Que le monde des médias américains, pourtant soumis, bien davantage que chez nous, à la loi du marché et aux suffrages de l’opinion, est déconnecté des aspirations de la majorité de la population. Entre les élites supposées et les classes moyennes et populaires, ce n’est plus un fossé, c’est un abîme qui s’est creusé. Pourquoi? Parce que, d’une manière générale, dans nos démocraties, le monde que décrit la sphère politico-médiatique n’est pas celui dans lequel ont l’impression de vivre la majorité des gens. Alors, forcément, ça les énerve. Et ils ont de plus en plus tendance à voter contre ce que leur recommande le prêchi-prêcha médiatique.

Vous êtes de ceux que cela réjouit?

On aurait envie de battre des mains devant cette déconvenue méritée… si le résultat n’était pas l’arrivée à la tête de la plus puissante démocratie libérale du monde d’un personnage aussi manifestement inapte à la fonction présidentielle. Alors, on peut féliciter le New York Times d’avoir publié une tribune dans laquelle ce grand quotidien reconnaissait s’être planté, avoir méconnu la réalité sociale du pays, être passé à côté d’un évènement de portée historique. On attend encore le même genre de confession de la part des médias français. Pensez que certains en sont encore à mettre en cause le «plafond de verre» qui empêcherait une femme de devenir présidente des Etats-Unis! Comme si un pays qui a été capable d’élire à deux reprises un président noir – alors que ceux-ci ne représentent que 12 % de la population -, ne pourrait pas élire une femme – alors qu’elles sont plus nombreuses à voter que les hommes.

Dans les colonnes de FigaroVox, vous déclariez «le parti des médias et l’intelligentsia méprisent la réalité.». Ont-ils méprisé Donald Trump et ses électeurs?

Ah oui! Que n’a-t-on pas entendu sur ces «petits blancs», forcément racistes ; sur ces ploucs non diplômés de l’Université, et incapables, de ce fait, de s’élever à l’altitude proprement himalayesque où évoluent les grands esprits qui peuplent les départements des «post-colonial studies»! Y compris, chez nous, en France, où l’antiaméricanisme des élites s’alimente, depuis toujours, à un mépris culturel du «red-neck», amateur de country-music, du crétin des Appalaches, plus ou moins dégénéré. Hillary Clinton a commis une fameuse gaffe, en déclarant que les électeurs de Trump étaient deplorable (lamentables, pitoyables). C’est cette arrogance qui a été ressentie comme insupportable. Même chose, ici, en France. L’élite ignore tout du pays profond. Comment le connaîtrait-elle? Pensez que les médias nous ont présenté les Nuits Debout comme l’amorce d’un mouvement social de fond qui s’apprêtait à révolutionner le pays! Tandis que les spécialistes en sciences sociales nous vantent «l’intersectionnalité des luttes», ou le «féminisme islamiste»! On est bien avancés. Ceux qui essaient de comprendre ce qui se passe, comme Christophe Guilluy, se font traiter de suppôts du Front national! Laurent Davezies, Eric Dupin, ou encore Jean-Pierre Le Goff, pour ne prendre que ces trois-là, ne sont pas lus par les politiques. Ils auraient pourtant beaucoup à y apprendre.

Est-ce la fin du «politiquement correct» inventé au Etats-Unis?

Ah! Ce serait trop beau! Mais une chose est sûre: Hillary Clinton s’est pris les pieds dans le tapis de l’appel au vote «genré» et «racialisé». Durant toute sa campagne, elle en a appelé au vote des femmes, comme s’il lui était acquis par droit naturel. Seulement 54 % des électrices l’ont finalement choisie. Malgré tous les témoignages accablants sur le sexisme de Trump. Elle a aussi semblé considérer que vote des Noirs et des Hispaniques lui revenait d’office. Elle a pratiqué, comme jamais auparavant dans une présidentielle, la «politique des identités» à laquelle s’est converti le Parti démocrate. Mais, d’une part, ces électeurs n’ont pas apprécié d’être considérés comme acquis: 29 % des Latinos ont voté Trump, soit deux points de plus que pour Mitt Romney en 2012. Et d’autre part, Clinton a provoqué, par contre-coup, un réflexe de «victimisation» au sein de la classe ouvrière blanche. Car le grand paradoxe des politiques identitaires, c’est de flatter toutes les minorités sauf une. On répète aux petits blancs qu’ils sont en train de perdre la majorité et qu’en plus, ils sont des ratés, sans recours possible à l’affirmative action. Comment s’étonner qu’ils se constituent en minorité agissante, comme les autres? Avec discipline de vote et lobbying à la clé. Obama avait essayé d’engager les États-Unis dans la voie d’une politique post-raciale. Clinton a dilapidé cet héritage. Ça laissera des traces.

Dans une chronique de France culture, vous mettiez en lumière la fracture politique et sociale des Etats-Unis…

C’est comme s’ils étaient au bord d’une nouvelle Guerre de Sécession! Et cette campagne électorale n’aura rien arrangé. Le fossé entre démocrates et républicains s’est creusé. Fini, le temps où l’électorat des deux partis se recoupait, au centre. Ensuite, il y a la fracture sociale entre l’Amérique des diplômés et celle des laissés-pour-compte. Entre les gagnants et les perdants de la mondialisation. La tradition consistait, pour le parti vaincu aux présidentielles, à participer à l’élaboration des politiques en négociant à partir de ses positions au Congrès. Sous Obama, le système a été bloqué. «Congressional gridlock». Blocage par le Congrès. La plupart des grands projets d’Obama ont été ainsi enrayés ; que ce soit la Banque d’investissement dans les infrastructures ou l’idée d’un impôt négatif pour les travailleurs pauvres. Cette fois, les Républicains tiennent la présidence, la Chambre des Représentants, le Sénat et 33 sièges de gouverneurs sur 50. Sans compter, la majorité conservatrice de la Cour Suprême. On peut redouter que cela crée une frustration terrible chez les démocrates et leurs partisans.

La France n’est-elle pas tout aussi fracturée? Un phénomène Trump est-il possible en France?

Je ne sais pas. D’abord, Trump n’a pas d’équivalent en France. Un pro de la télé qui séduit l’électorat parce qu’il se vante de n’être pas un politique. Un provocateur, qui se sert de son inexpérience, voire de son incompétence, pour se faire élire par un électorat qui a pris la classe politique en haine, nous n’avons pas ce profil… Ou alors Cyril Hanouna, bien davantage qu’Eric Zemmour, auquel certains ont songé. Marine Le Pen s’y voit déjà. Mais paradoxalement, son entreprise de dédiabolisation du Front national la dessert dans ce registre. Elle cherche à apparaître comme une politicienne comme les autres. Son père, lui, savait mettre les rieurs de son côté en faisant le singe. La voie choisie par Trump a été précisément de ne pas jouer le jeu politique traditionnel, d’en transgresser toutes les règles, de s’en moquer ouvertement, en prenant les spectateurs à témoin, de manière à les rendre complices. C’est un truc de one-man show. Ca demande du métier!

Trump est isolationniste en matière de politique étrangère et protectionniste en matière économique. Sa victoire est-elle le résultat du double échec du «néoconservatisme» et du «néolibéralisme»?

Ah oui, voir en Donald Trump l’incarnation du néo-libéralisme, comme l’a fait, par exemple, François Cusset dans Libération, c’est du dernier comique. Une partie des intellectuels de gauche est bien embêtée: Trump est un altermondialiste doublé d’un keynésien! Il entend renégocier tous les traités de libre-échange déjà signés comme l’ALENA et refuser tous ceux qui ne le sont pas encore, comme le TTIP. Il est violemment hostile à l’OTAN, qu’il considère comme «dépassé» et laisse entendre que les alliés des Américains n’ont qu’à se débrouiller tout seuls. Son programme de grands travaux de type New Deal, il l’a chiffré à 550 milliards de dollars, ce qui est proprement astronomique. Nos intellectuels de gauche n’aiment pas tout ce qui, dans le programme de Trump, le rapproche de la gauche la plus traditionnelle.

Vous avez soutenu ce double mouvement. Pourquoi cela ne fonctionne-t-il plus?

C’est vrai. Je continue à penser que notre monde est bien plus dangereux depuis que le shérif américain est devenu réticent – avec Obama. Voyez la Syrie. Et je crains qu’il ne devienne encore plus dangereux avec, à la Maison Blanche, un isolationniste qui considère que la planète peut bien sombrer dans le chaos, pourvu que les Etats-Unis soient protégés par deux océans et une grande muraille. Quant à la mondialisation, si elle est désormais refusée par des majorités, c’est parce qu’on lui fait porter le chapeau de deux autres phénomènes: les révolutions combinées du numérique et de la robotique – qui vont remplacer les emplois salariés par l’uberisation du travail, et l’immigration de masse, qui menace les modes de vie locaux et les unités nationales. Les peuples réclament des frontières derrière lesquelles ils pensent trouver les protections auxquelles ils étaient habitués. Je ne crois pas que cela puisse fonctionner comme dans les années 50… En outre, la démondialisation qui se profile, en effet, va plomber la croissance. Vous verrez.

L’élection de Trump après la victoire du Brexit marque-t-elle le début d’une nouvelle ère qui serait celle de «la fin de la fin de l’Histoire» et du retour des nations?

-Oui, peut-être. Mais j’y vois plutôt la poursuite d’un processus de prise du pouvoir par des populistes. Il y a eu les phénomènes Poutine, Erdogan, Orban, Xi Linping, et maintenant Trump: un nouveau type de dirigeants nationalistes et autoritaires, qui considèrent le reste du monde comme globalement hostile. Et au milieu de cette mêlée, notre pauvre petite Union européenne, incapable de décider quoi que ce soit, sans parler de se défendre. Ca nous promet des lendemains qui déchantent…

  1. Quan érem joves se’ns deia que «la revolució [el socialisme] no es podia exportar»; en canvi ara, en ple apogeu de la ideología neoliberal, se’ns diu que la «democracia» [el capitalisme] sí que es pot exportar… ni que sigui enviant avions de combat! Quan sento tots aquests propagandistes (com l’excamarada Couturier) que ens diuen que ara el món és molt més segur, em demano si els haurà d’esclatar una bomba al nas perquè els caigui la bena dels ulls.

  2. Article molt interessant analitzant el funcionament de la premsa actual:

    – la rapidesa de les notícies,
    – la valoració superficial sense la tasca de cap especialista capaç de reorganitzar la informació, les causes, els fets i les conseqüències
    – la relació entre periodistes i polítics que perjudica el dret a la informació.

    tot aixó afavoreix el populisme sigui de Podemos, d’Erdogan o de Donald Trump.

    i respecte a la relació de França i el jihad, és partidari de lluitar contra aquest totalitarisme i deixar de banda el “bonisme”

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