El proppassat 12 d’aqueix mes el filòsof Alain Finkielkraut, (acusat de neo-reaccionari pels inquisidors del progressisme políticament correcte) fou l’encarregat de pronunciar l’anual discurs sobre la virtut que d’ençà 1782 l’Academie Française dedica als ciutadans exemplars. L’autor ho ha aprofitat per qüestionar el nou ordre moral que s’està imposant a la vida pública francesa i, en general, a les societats obertes occidentals, també la catalana. Val la pena reflexionar sobre aqueixos paràgrafs extrets de la versió íntegra original:
Cet ordre moral, autrement dit, n’est pas réactionnaire ni même conservateur. Loin de trembler pour ce qui existe, il n’a de cesse de faire bouger les choses. Dénué de la moindre nostalgie pour les jours anciens, il liquide allégrement les archaïsmes et il écarte rageusement les obstacles à la marche de l’Histoire, c’est-à-dire, comme l’a montré Tocqueville, à l’égalisation progressive des conditions. On ne doit donc pas y voir un code de conduite gravé dans le marbre, mais une révolution permanente de la sociabilité. Ce n’est pas la fixation sur quelques règles intangibles, c’est la dynamique même de la démocratie. Ce n’est pas une forme qui enferme, c’est une force qui va, qui ne laisse rien debout, qui n’admire que son propre mouvement, qui annexe le passé sous prétexte de le « dépoussiérer », qui engloutit l’art dans le non-art, qui nivelle la langue et qui ravage les rapports interpersonnels pour mieux les purifier de toute espèce d’aliénation. N’épargnant aucun domaine de l’existence, sa dévorante passion démocratique nettoie notre civilisation de ce qui en faisait le prix ; et quand cette civilisation est mise au défi par l’intolérance dont parle Rushdie, il l’accuse d’avoir creusé les inégalités. Elle est responsable, du fait de ses pratiques discriminatoires, de la haine qu’elle suscite et des attaques qui la visent. Elle ne peut s’en prendre qu’à elle-même si tant de gens, à l’intérieur même de ses frontières, lui en veulent mortellement. La violence dont elle est l’objet procède de son essence criminelle. Le nouvel ordre moral commande donc non de la défendre mais de la défaire. Une fois devenue rien, elle ne sera plus en mesure de stigmatiser personne. « Aucune civilisation ne cède à une agression extérieure si elle n’a pas d’abord développé un mal qui la rongeait de l’intérieur », écrivait Polybe. Ce mal est aujourd’hui d’autant plus redoutable qu’il se présente comme l’accomplissement du bien.
Post Scriptum, 15 de gener del 2020.
Avui, Vicent Partal fa referència al seu editorial de Vilaweb al pensament d’Alain Finkielkraut que comparteixo (llevat de la crítica que fa al suport d’aqueix filòsof francès a l’Estat d’Israel): “Un poc de Finkielkraut, per a entendre els Verds i l’aversió als esdeveniments inclassificables”.
Post Scriptum, 19 d’octubre del 2021.
Le Figaro entrevistà ahir Alain Finkielkraut: «Ces humoristes qui se rêvent en rebelles sont le bras armé de la bien-pensance». Nous sommes entrés dans l’ère de l’après-humour: un monde où le sarcasme est mis au service de l’idéologie pour ostraciser et écraser des ennemis politiques, s’inquiète le philosophe et écrivain. En ces temps de précampagne présidentielle, le débat public se caractérise par des méthodes de plus en plus délétères, s’inquiète le philosophe et écrivain, qui déplore la violence croissante des propos dans l’espace médiatique. Le penseur s’interroge sur la légitimité de la rhétorique antifasciste employée à l’encontre d’Éric Zemmour. Philippe Muray appelait «rebellocrates» ces artistes pratiquant l’insoumission subventionnée. Aujourd’hui, ils font régner la terreur par le ricanement, de France Inter aux réseaux sociaux, constate Alain Finkielkraut.
Post Scriptum, 21 de juliol del 2022.
Interview de Alain Finkielkraut abans d’ahir a Israel Valley del qual val la pena retenir aqueixos paràgrafs:
Le sujet de l’identité n’est-il pas celui où l’on vous caricature le plus?
Dans les années 1980, les Français ne devaient pas se réclamer de leur identité, c’était soit anachronique, soit antipathique puis, quand Jean-Marie Le Pen est arrivé, c’est devenu impossible. L’identité juive était, en revanche, bien portée. Ce n’est plus le cas car il nous faut maintenant répondre des « crimes » d’Israël. Il m’arrive d’être pris à parti à cause de mon amour « viscéral » d’Israël. Je suis pourtant signataire de JCALL [European Jewish Call for Reason] et je soutiens, depuis 1980, l’option des deux États. Mais aujourd’hui, on ne peut être juif dans l’espace majoritaire qu’en s’excusant d’Israël. Je critique Israël, mais je ne m’excuse pas d’Israël. Donc, c’est vrai : je suis caricaturé à la fois en tant que juif et en tant que Français puisqu’on dit que je vais rejoindre les identitaires.
Marine Le Pen monte dans les sondages.
Raison de plus pour être attentif à la réhabilitation de l’identité française, courageusement menée par Jean Daniel dans le sillage de Lévi-Strauss. La gauche, hélas, préfère le déni des problèmes à l’analyse et quand Manuel Valls dit qu’il faut revenir sur la politique du regroupement familial, un froid polaire descend sur le gouvernement socialiste. On ferme les yeux pour se tenir chaud. Et on accuse d’islamophobie ceux qui, plutôt que de soumettre la République aux exigences de l’islam, veulent soumettre les musulmans aux lois de la République. Ce n’est pas ainsi qu’on pourra vaincre le Front national. Je vous rassure donc : je ne vais pas voter Marine Le Pen. Je la combattrai, mieux que ses adversaires.
Post Scriptum, 15 de desembre del 2022.
Ahir, a Tribune Juive, Alain Finkielkraut: “Le prix Nobel de littérature est devenu le prix Nobel de l’idéologie”.
Post Scriptum, 6 de gener del 2024.
Aparegudes gairebé al mateix temps dues entrevistes a Finkielkraut de lectura recomanada: abans d’ahir a Le Figaro, ahir a Causeur.
Post Scriptum, 19 de gener del 2024.
Entrevista a L’Express del proppassat 14 d’aqueix mes: “Partout, les juifs s’aperçoivent qu’ils ne font pas le poids”, de la qual val la pena exptreure’n aqueixos paràgrafs:
Vous évoquez dans le livre votre engagement dans le mouvement de Mai 68. Pourquoi avoir ensuite pris vos distances avec lui ?
En Mai 68, j’étais, pour reprendre la célèbre expression de Philippe Muray, un « mutin de Panurge ». Je manifestais comme on manifestait, je me révoltais comme on se révoltait, je m’indignais comme on s’indignait : “Cours, camarade, le vieux monde est derrière toi !” criais-je avec une ferveur mimétique. Puis je me suis progressivement aperçu que ce vieux monde n’était pas pesant mais fragile et qu’il s’éloignait de nous sans crier gare.
Si je devais résumer d’une formule mon itinéraire, je dirais que je suis passé d’un printemps à l’autre, du printemps parisien au printemps de Prague, du lyrisme révolutionnaire au scepticisme post-révolutionnaire, du pathos de l’émancipation à la défense passionnée de la culture qui m’a mis au monde.
A l’époque, que pensiez-vous des intellectuels libéraux ou conservateurs qui critiquaient cette “révolution introuvable”, selon la formule de Raymond Aron ?
Force m’est de reconnaître qu’à l’époque, la critique de Mai 68 ne me touchait absolument pas. Je n’avais aucune considération pour la droite. Il n’y avait à mes yeux de vérité et de salut qu’à gauche, et même à la gauche de la gauche.
Vous consacrez, sous le patronage de Kundera, un chapitre à l’Europe comme civilisation. Vous faites l’éloge des (petites) nations qui la composent et de leur singularité qui n’empêche pas leurs points de rencontre. Comment expliquez-vous que la dimension culturelle de la nation soit si peu présente dans les discours des partis nationalistes en France ?
Au Moyen-Age, écrit Kundera dans un Occident kidnappé, l’idée de l’Europe reposait sur la religion commune. Dans les temps modernes, le Dieu médiéval se transforma en deus absconditus et c’est la culture qui devint la réalisation des valeurs suprêmes par lesquelles l’humanité européenne se comprenait, se définissait, s’identifiait. Aujourd’hui, la culture à son tour cède la place. Nous vivons sous le règne égalitaire du “tout culturel”. Ni la droite, ni la gauche, ni le centre ne résistent à ce nihilisme souriant.
Vous avez été l’un des premiers intellectuels à vous inquiéter de la baisse du niveau éducatif en France. Vous n’étiez pas d’accord pour dire, comme Christian Baudelot et Roger Establet dans leur ouvrage éponyme de 1989, que “le niveau mont (ait)”. Alors que le dernier rapport Pisa fait état du déclin avancé de l’école, ministère et chercheurs doivent bien reconnaître l’évidence. Comment expliquez-vous que leur aveuglement ait été si long et si fort ?
L’aveuglement reste très fort : alors même que le bon usage se perd, que la syntaxe s’effondre et que le vocabulaire se réduit à vue d’œil, des linguistes béats nous expliquent que “le français va très bien, merci” [NDLR : du nom d’un “Tract” publié récemment chez Gallimard]. Depuis Bourdieu, les sciences sociales divisent le monde en deux camps, les dominants et les dominés. La culture générale favorisant les dominants, on a dit qu’elle relevait du délit d’initiés et on l’a exclue de l’école. Ainsi s’est répandu l’enseignement de l’ignorance. Malgré l’acharnement des sociologues, le désastre est désormais visible à l’œil nu. L’heure du sursaut semble arriver. J’espère seulement qu’il n’est pas trop tard.
On doit l’expression d’ “enseignement de l’ignorance” au philosophe Jean-Claude Michéa. Partagez-vous le diagnostic qu’il faisait dans le livre du même nom paru en 1999 ?
Jean-Claude Michéa et moi sommes d’accord sur le diagnostic mais pas sur les causes. Pour lui, l’enseignement de l’ignorance est imputable au capitalisme. Or je pense de mon côté qu’il procède bien plutôt de l’égalitarisme.
Vous regrettez que l’on accuse les boomers de s’en être mis plein les poches tout en polluant la planète. Les boomers n’ont-ils rien à se reprocher ?
“La catastrophe, c’est lorsque les choses suivent leur cours”, disait Walter Benjamin. Ceux qu’on appelle les “boomers” n’ont rien fait pour interrompre le processus. De là à encenser Greta Thunberg, il y a un pas que je me garderai de franchir.
A notre époque, notez-vous, “même coupable, un dominé est innocent”. La mise en valeur de la figure de la victime chère aux woke n’est-elle pas, après tout, un motif chrétien ?
“Le monde est plein de vertus chrétiennes devenues folles”, disait G.K. Chesterton. L’actualité lui donne raison.
Vous demandez : “Y aura-t-il jamais une épreuve de vérité pour l’idéologie woke ?” Ce qui s’est passé sur les campus américains après le 7 octobre, où des étudiants juifs ont été menacés, n’en est-elle pas une ?
D’une dichotomie l’autre. Le wokisme a pris dans les campus la relève du marxisme. L’ennemi à abattre, ce n’est plus le capitalisme, c’est l’impérialisme blanc. Et depuis la guerre des Six Jours, Israël est dans le mauvais camp. Ce n’est plus un pays de réfugiés, c’est une entreprise coloniale. Ainsi, un antisémitisme antiraciste se déchaîne en toute bonne conscience dans les universités du monde occidental. Woke veut dire “éveillé”. Se réveille-t-on d’un éveil ? La clairvoyance retrouvera-t-elle un jour ses droits ? Rien n’est moins sûr.
Vous regrettez la dévalorisation de l’histoire comme “roman national”. N’est-il pas légitime de critiquer ce concept ? L’histoire n’est-elle pas davantage une forme de savoir qu’un roman ?
Je me garderais de parler de roman national. L’histoire doit être enseignée telle qu’elle est, avec ses ombres et ses lumières, le plus objectivement possible. Naguère encore, tous les Français, quelle que soit leur origine, devenaient, notamment par l’école, des héritiers de l’histoire de France. Aujourd’hui, on lutte contre les « crispations identitaires » en fracturant cette histoire, en la rendant discontinue, ou en proclamant qu’elle a été faite de bout en bout par les étrangers. Comme en témoigne L’Histoire mondiale de la France, le livre dirigé par Patrick Boucheron, le wokisme foule aux pieds le droit fondamental de l’homme à la continuité historique.
La “mémoire impérieuse” de la Seconde Guerre mondiale, qui dévalorise toute proposition politique un tant soit peu patriotique, “se révèle incapable de faire la différence entre Pétain et De Gaulle”, écrivez-vous. Tout ce qui ressemble à De Gaulle se voit ramené à Pétain. Que pensez-vous de l’attitude inverse, celle d’Eric Zemmour, qui consiste à faire croire que Pétain était aussi honorable que De Gaulle ?
La réhabilitation partielle de Pétain par Eric Zemmour n’a convaincu personne, et c’est heureux. Mais ce qui scandalise tout le monde ou presque, c’est la phrase de De Gaulle : “Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne”. Aux yeux de l’esprit du temps, ces mots font de l’homme du 18 juin un émule d’Adolf Hitler.
Vous rappelez à plusieurs reprises que le juif enraciné (notamment en Israël) et critique de l’islam est, pour ses ennemis, le nouveau “nazi”. Comment a-t-on pu en arriver là ?
Michel Foucault qualifiait d’ignominieuse la résolution de l’ONU faisant du sionisme une forme de racisme. Cette définition va aujourd’hui de soi dans les cercles progressistes. Les juifs ne sont plus protégés par le devoir de mémoire. Ils sont accusés de perpétrer un génocide contre le peuple palestinien. En même temps, un nouveau mot d’ordre surgit : “From the river to the sea, Palestine will be free”. Il ne s’agit plus de partager cette terre mais de la purger de toute présence juive. Comme le notait il y a quelques années l’écrivain David Grossman : “Tragiquement, Israël n’a pas réussi à guérir l’âme juive de sa blessure fondamentale, la sensation amère de ne pas être chez soi dans le monde”. Depuis le 7 octobre, cette blessure est à vif. Partout dans le monde, les juifs s’aperçoivent qu’ils ne font pas le poids.
Vous tentez, avec courage, de défendre Renaud Camus, en soulignant que la notion de « grand remplacement » est tout à fait acceptée lorsqu’il s’agit de s’en réjouir. Souhaiteriez-vous que le débat public soit le lieu d’une confrontation la plus large possible, de ceux qui, par exemple, en appellent au génocide des juifs ou nient l’existence d’Auschwitz, à ceux qui professent le racisme ? Ou bien faut-il mettre des limites à la liberté d’expression ?
Tout le monde a le droit d’avoir ses propres opinions mais pas ses propres faits. La liberté d’expression ne saurait donc inclure le négationnisme. Pour ce qui est de Renaud Camus, avec lequel j’ai de graves divergences, je constate seulement que ceux qui le condamnent à la mort sociale n’en ont pas lu une ligne. Ils se veulent les héritiers des dreyfusards, mais ceux-ci opposaient le scrupule au préjugé ; eux font le contraire.
Post Scriptum, 12 de juny del 2024.
Avui a Tribune Juive, recull les paraules d’Alain Finkielkraut: “La situation actuelle est un crève-cœur pour les Juifs français. Jamais je n’aurais imaginé voter un jour en faveur du Rassemblement national pour faire barrage à l’antisémitisme“. Alain Finkielkraut n’exclut pas de voter RN pour faire barrage à l’abjection LFI
« Les Républicains ayant repoussé ses avances, Emmanuel Macron n’avait peut-être pas d’autre choix que de dissoudre l’Assemblée nationale. Le pays, si les choses étaient restées en l’état, serait devenu ingouvernable. Mais la volonté d’exclure le Rassemblement national de l’arc républicain est absurde. On ne peut jouer éternellement la carte de la peste brune ni marquer du sceau de l’infamie xénophobe l’angoisse existentielle d’une majorité de Français devant la pression migratoire. Sur le modèle du Danemark, tous les partis devraient s’employer à défendre le droit à la continuité historique et à rétablir le contrôle des frontières. Au lieu de cela, le Conseil constitutionnel, saisi par le président de la République, a censuré l’essentiel de la loi immigration. Jordan Bardella doit une fière chandelle à Laurent Fabius !
LFI a fondé toute sa campagne européenne sur la haine d’Israël et des sionistes. “Nous n’appartenons pas à la même espèce humaine”, a osé écrire Aymeric Caron, tandis que Rima Hassan, égérie monomaniaque de la gauche radicale, plaidait inlassablement pour une Palestine libre du fleuve à la mer. Abjection payante : la liste conduite par Manon Aubry frôle les 10 %, et il reste une grande réserve de voix dans les “quartiers populaires”. Jamais je n’aurais imaginé voter un jour en faveur du Rassemblement national pour faire barrage à l’antisémitisme. Ce n’est pas encore le cas, mais peut-être y serai-je contraint à plus ou moins longue échéance s’il n’y a pas d’alternative. Ce serait un cauchemar. La situation actuelle est un crève-cœur pour les Juifs français. »
Us ha agradat aquest article? Compartiu-lo!